Honorer nos ancêtres en ouvrant la voie de l'avenir

Rapport provisoire au Comité consultatif mixte sur les relations financières – à des fins de participation

Juin 2019

Format PDF (3,0 Mo, 51 pages)

Table des matières

Message du comité

Chef national Bellegarde et ministre O'Regan,

Merci de nous avoir invités à participer au Comité consultatif mixte sur les relations financières.

Le présent rapport fait état des résultats des recherches et des discussions menées par le Comité consultatif mixte sur les relations financières (le comité) à ce jour et recommande des orientations que les Premières Nations et la Couronne pourraient adopter afin de poursuivre les travaux essentiels entrepris sur les relations financières entre la Couronne et les Premières Nations.

Le rapport décrit la vision du comité qui permettrait d'améliorer les relations financières de nation à nation ainsi que les relations financières fondées sur des traités entre les Premières Nations et le Canada. Il comprend des options pour l'établissement d'une nouvelle relation financière entre la Couronne et les Premières Nations qui serait conforme aux traités et qui assurerait la reconnaissance et le respect des droits inhérents. Bien que le rapport du comité s'adresse au chef national de l'Assemblée des Premières Nations et au ministre des Services aux Autochtones, le comité souhaite que sa vision et ses recommandations éclairent et appuient une vaste collaboration avec toutes les Premières Nations. Le comité a clairement indiqué qu'aucune des recommandations formulées dans le présent rapport ne doit être imposée à une Première Nation ou ne doit modifier les relations de nation à nation et les relations fondées sur les traités que les Premières Nations entretiennent avec la Couronne.

Le comité reconnaît que la vision et les recommandations énoncées dans le présent document entraîneront des transformations et qu'elles vont bien au-delà de ce qui a existé et de ce qui existe aujourd'hui. Pour réaliser cette vision, des progrès devront être réalisés sur de nombreux fronts, notamment la reconnaissance, le respect et la protection des titres, des compétences et des droits inhérents des Premières Nations par la Couronne ainsi que la mise en œuvre des traités de façon honorable par la Couronne. Le comité souligne que d'autres processus doivent être établis pour aborder ces questions et d'autres points importants qui ne font pas partie de son mandat. Lorsque les recommandations vont au-delà du mandat actuel du chef national de l'Assemblée des Premières Nations, lequel est défini dans les résolutions des chefs réunis en assemblée, il a été précisé que les dirigeants et les spécialistes des Premières Nations doivent participer et qu'il est nécessaire de les consulter. Lorsque les recommandations ne relèvent pas de la compétence du ministre de Services aux Autochtones Canada, il a été mentionné que d'autres représentants fédéraux, provinciaux ou territoriaux doivent être mobilisés.

Remerciements

Nous aimerions remercier le chef national de l'Assemblée des Premières Nations et le ministre des Services aux Autochtones – sans leur vision et leur appui, le travail du comité n'aurait pas été possible. Merci à Dan Wilson et à John Lees qui ont fourni des services d'animation, d'analyse technique et de soutien à la rédaction. Nous tenons également à remercier les nombreuses personnes qui ont appuyé notre travail, notamment Jonathan Dewar, Ainslee Kent, Kara Rideout et les nombreux techniciens et administrateurs de Services aux Autochtones Canada et de l'Assemblée des Premières Nations qui ont contribué à la coordination, à l'analyse et aux communications.

Plus important encore, nous aimerions remercier nos employeurs et nos collègues dirigeants des Premières Nations qui nous ont permis de participer à ce comité et qui nous ont fait part de commentaires et de points de vue réfléchis.

À propos du comité

D'après les recommandations conjointes de Services aux Autochtones Canada et de l'Assemblée des Premières Nations, le ministre des Services aux Autochtones (le ministre) a formé le Comité consultatif mixte sur les relations financières (le comité) et lui a confié le mandat de donner des conseils au chef national de l'Assemblée des Premières Nations (le chef national) et au ministre concernant l'établissement d'une nouvelle relation financière entre les Premières Nations et le Canada.

Chef Richard Sidney, Yukon
Le chef Richard Sidney est le Nha Shade Heni (chef) du Conseil des Tlingits de Teslin. Il a travaillé pour les Tlingits de Teslin pendant de nombreuses années, notamment au sein de l'équipe de négociation de l'Entente définitive et de l'Entente sur l'autonomie gouvernementale. Le chef Sidney continue de déployer des efforts pour améliorer le sort de sa collectivité, de ses citoyens et du Yukon.

Richard Nerysoo, Territoires du Nord-Ouest
Richard Nerysoo est un dirigeant politique chevronné de la Fraternité des Indiens, de la Nation des Dénés et du gouvernement des Territoires du Nord-Ouest. Richard a été le premier Autochtone et la plus jeune personne à devenir premier ministre des Territoires du Nord-Ouest, ainsi que le premier président autochtone à l'Assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest.

Chef David Jimmie, Colombie-Britannique
Le chef David Jimmie est chef et directeur général élu de la Première Nation Squiala depuis 2009. Le chef Jimmie est également président du Conseil des chefs de la Nation Stó:lo et de la tribu Ts'elxweyéqw. David possède et exploite l'entreprise DJimmie Construction, qui construit actuellement un projet d'aménagement planifié de 336 maisons à Chilliwack, en Colombie-Britannique.

Chef Lee Crowchild, Alberta
Le chef Lee Crowchild est le chef élu de la Première Nation Tsuu T'ina et la troisième génération de Xakiji (chef), suivant les traces de son père et de son grand-père. Le chef Crowchild est un homme du peuple et il sait que « pour servir le peuple, on doit faire preuve de diligence, de sacrifice et d'un grand dévouement » [traduction].

Vice-chef Heather Bear, Saskatchewan
La vice-chef Heather Bear est la quatrième vice-chef de la Fédération des nations autochtones souveraines. La Fédération des nations autochtones souveraines représente 74 Premières Nations de la Saskatchewan et s'est engagée à promouvoir, à protéger et à mettre en œuvre les traités. La vice-chef Bear est membre de la Première Nation d'Ochapowace.

Chef Laurie Carr, Ontario
La chef Laurie Carr est la chef élue de la Première Nation Hiawatha. Ses portefeuilles comprennent les affaires politiques et intergouvernementales, les négociations, les consultations de base, les questions juridiques et financières, les relations découlant des traités et les services de police. Laurie est présidente du conseil d'administration des Dnaagdawenmag Binnoojoojiiyag Child & Family Services et siège au conseil des chefs de l'Association des Iroquois et des Indiens alliés.

Chef Connie Lazore, Québec
La chef Connie Lazore est chef de district élue de Tsi Snaihne pour la communauté mohawk d'Akwesasne. Avant de devenir chef de district, la chef Lazore a servi sa communauté comme employée du Conseil mohawk d'Akwesasne pendant 27 ans.

John G. Paul, région de l'Atlantique
John G. Paul est directeur exécutif du Secrétariat du Congrès des chefs des Premières Nations de l'Atlantique. John est un défenseur des politiques sur des questions importantes concernant les Premières Nations. Il est un Mi'kmaq et fait partie de la Première Nation de Membertou.

Harold C. Calla, expert technique
Harold C. Calla est président exécutif du Conseil de gestion financière des Premières Nations. Ce dernier aide les Premières Nations à mettre en place de bonnes pratiques de gouvernance et de financement pour atteindre leurs objectifs. Il est membre de la Nation Squamish.

Don Drummond, expert technique
Don Drummond est boursier Stauffer-Dunning en politiques publiques mondiales et professeur auxiliaire à l'école d'études stratégiques de l'Université Queen's. Il est un ancien haut fonctionnaire fédéral et a été économiste en chef à la Banque TD.

Terry Goodtrack, expert technique
Terry Goodtrack est président et chef de la direction d'AFOA Canada. AFOA Canada fournit aux peuples autochtones un soutien financier ainsi qu'un soutien en matière de gestion et de gouvernance, pour les aider à gouverner leurs nations et leurs entreprises. Terry est un Lakota de la Première Nation Lakota de Wood Mountain.

Bonnie Healy, experte technique
Bonnie Healy est infirmière autorisée de la Nation Kainai (tribu des Blood). Elle est directrice générale de l'Alberta First Nations Information Governance Centre et présidente du Centre sur la gouvernance de l'information des Premières Nations (national). L'Alberta First Nations Information Governance Centre s'efforce de respecter les principes de PCAP® (propriété, contrôle, accès et possession) des Premières Nations en matière de données, d'information et de connaissances traditionnelles.

Kevin Page, expert technique
Kevin Page est le président-directeur général fondateur de l'Institut des finances publiques et de la démocratie de l'Université d'Ottawa. Kevin est un ancien haut fonctionnaire fédéral et a été le premier directeur parlementaire du budget du Canada.

Sommaire

Les relations appropriées entre les Premières Nations et la Couronne sont des relations de nation à nation et des relations fondées sur des traités – ce qui était le cas lorsque les traités ont été conclus initialement, comme l'a reconnu la Couronne dans la Proclamation royale de 1763 et comme l'a reconnu et confirmé le Canada dans l'article 35 de sa propre Loi constitutionnelle de 1982. Comme la Cour suprême du Canada l'a souligné au Canada, l'objectif est de concilier la souveraineté préexistante des Premières Nations et la souveraineté proclamée de la Couronne. Malgré les politiques et les actions colonialistes, le statut de nation des Premières Nations a perduré, profondément enraciné dans les relations de parenté et la vision du monde des Autochtones. Ce statut de nation est antérieur aux premiers contacts, n'a jamais été éteint ou diminué, et demeure la caractéristique déterminante des relations entre la Couronne et les Premières Nations.

Le comité envisage un avenir où les relations entre la Couronne et les Premières Nations seront fondées sur le respect et la confiance, un avenir où les relations de nation à nation respecteront l'esprit et l'intention originaux des traités. Ces relations de nation à nation englobent nécessairement les relations financières qui fournissent aux Premières Nations les moyens de financer leurs activités autonomes et d'améliorer le bien-être de leurs nations, de leurs collectivités et de leurs citoyens en maintenant le mode de vie que la création leur a destiné. Pourtant, ces relations financières ne peuvent profiter aux Premières Nations de façon isolée. Il est primordial de respecter les traités et de reconnaître les titres, les compétences et les droits inhérents des Premières Nations pour leur permettre de tirer pleinement parti d'une relation financière.

Le présent rapport décrit une structure qui permet aux gouvernements des Premières Nations de reprendre la place qui leur revient dans la gouvernance de leurs citoyens. Cela commence par la reconnaissance et l'affirmation pleine et entière des titres, des compétences et des droits inhérents et issus de traités, et il faudra que les gouvernements fédéral et provinciaux agissent promptement, avec l'honneur et le respect qu'exigent ces changements fondamentaux. Dans cette optique, le comité souligne qu'aucune mesure, loi, changement de politique ou accord ne peut, en aucune façon, abroger ou transgresser les titres, compétences ou droits inhérents ou issus de traités des Premières Nations.

Il exige également qu'un financement et un soutien supplémentaires soient accordés pour la gouvernance des Premières Nations afin que des mesures immédiates soient prises et structurées d'une manière déterminée par les gouvernements et les institutions des Premières Nations.

Le plan consiste à établir des cibles et des indicateurs de rendement et à recueillir des données fiables qui, en collaboration avec les institutions des Premières Nations et par leur entremise, permettent d'évaluer les résultats réels et d'en rendre compte afin d'orienter l'apprentissage continu et les améliorations nécessaires pour atteindre les objectifs ambitieux qui ont été fixés.

Même si chaque Première Nation fixe ses propres objectifs et son rythme pour établir une nouvelle relation financière avec le Canada comme elle le choisit, le comité estime que les Premières Nations doivent travailler ensemble pour défendre leurs intérêts et établir les bases nécessaires pour que les relations entre la Couronne et les Premières Nations puissent évoluer rapidement. Dans le présent document, le comité envisage une voie vers une nouvelle relation financière qui comprend la conception conjointe des éléments fondamentaux ainsi que la réalisation de progrès additionnels au sein des structures existantes tout en poursuivant le changement transformationnel envisagé. Il faudra du temps pour abolir les lois, les politiques et les structures colonialistes qui font obstacle à l'autodétermination et aux relations de nation à nation, mais l'élimination de ces obstacles est essentielle pour créer une nouvelle relation financière. Les Premières Nations n'ont pas le temps d'attendre les réformes législatives et politiques, de sorte que des changements doivent être apportés aux politiques et aux structures existantes tandis que la vision à long terme se précise et se concrétise.

Pour ce faire, le comité doit poursuivre ses travaux aussi longtemps que nécessaire et rendre compte des progrès réalisés dans le cadre de ce plan.

Les 24 recommandations du comité à l'intention du ministre des Services aux Autochtones et du chef national de l'Assemblée des Premières Nations ont pour objectif d'orienter la conception et la mise en œuvre de nouvelles relations financières entre la Couronne et les Premières Nations. Le comité n'a pas l'intention d'imposer une nouvelle relation financière pour une ou toutes les Premières Nations, mais plutôt d'éclairer et d'appuyer les processus de collaboration et d'élaboration conjointe entre les Premières Nations et le Canada.

1. Introduction

Les relations appropriées entre les Premières Nations et la Couronne sont des relations de nation à nation et des relations fondées sur des traités – ce qui était le cas lorsque les traités ont été conclus initialement, comme l'a reconnu la Couronne dans la Proclamation royale de 1763 et comme l'a reconnu et confirmé le Canada dans l'article 35 de sa propre Loi constitutionnelle de 1982. Comme la Cour suprême du Canada l'a indiqué au Canada, l'objectif est de concilier la souveraineté préexistante des Premières Nations et la souveraineté proclamée de la Couronne.

Le fait que le Canada n'ait pas respecté la relation de nation à nation, en partie à cause de la Loi sur les Indiens, et de bien d'autres façons, ne fait pas l'objet de contestations. Au cours de cette relation, la nature et la fonction des Premières Nations ont été délibérément minées afin que le Canada puisse affirmer sa domination avec plus de force. Cela s'est traduit par l'adoption de lois, de politiques et de procédures qui visaient le génocide culturel en traitant les citoyens des Premières Nations comme des « pupilles de l'État » et dont le but était l'assimilation complète des Premières Nations pour mettre fin au « problème indien ». Parmi les mesures que le Canada a prises pour miner l'identité nationale autochtone, mentionnons la destruction des formes de gouvernance et des modes de vie des Premières Nations, y compris leurs activités économiques. De plus, le Canada a violé les traités en occupant exclusivement des terres qui devaient être partagées – jusqu'à la profondeur de labour – et en redistribuant une infime part de la richesse produite par ces terres pour maintenir les Premières Nations dans un état d'affaiblissement et de dépendance. Pourtant, la richesse du Canada repose sur la volonté des Premières Nations de partager les terres en vertu de traités.

Bien que la relation de nation à nation ne se limite pas à de simples questions financières, ces dernières constituent un élément important et elles sont essentielles au succès de la relation dans son ensemble. L'objectif du comité est de recommander des moyens par lesquels les Premières Nations peuvent atteindre l'autodétermination et l'autosuffisance, en aidant les Premières Nations à reprendre leur place légitime, comme égaux du gouvernement du Canada, dans le cadre d'une relation de nation à nation où les traités seront honorés et respectés. Cela suppose que les traités soient mis en œuvre de façon honorable et que l'on n'exige pas l'extinction des droits inhérents et issus de traités lors de la mise en œuvre ou du règlement de revendications territoriales ou de litiges.

Le comité propose d'appuyer les relations de nation à nation et les relations fondées sur des traités en éliminant les obstacles et en appuyant de façon proactive l'autodétermination et l'autosuffisance des Premières Nations. Cela comprend les mesures que le Canada doit prendre pour se retirer des domaines de gouvernance qui relèvent des gouvernements des Premières Nations, pour offrir réparation et restitution ainsi que pour appuyer et améliorer le processus d'autodétermination et l'autosuffisance des Premières Nations à l'avenir. Les citoyens des Premières Nations et leurs gouvernements veulent se charger d'apporter les changements nécessaires et de fournir des services publics à tous leurs citoyens, peu importe où ils vivent et sans égard à la définition coloniale de leur statut. L'autodétermination est un moyen éprouvé pour atteindre des objectifs communs, notamment : combler les écarts socioéconomiques; faire croître l'économie et créer de la richesse pour les Premières Nations et tous les Canadiens; préserver et promouvoir les langues, la culture et le patrimoine des Premières Nations et accroître l'autonomie et la résilience des Premières Nations.

Pour les Premières Nations et leurs citoyens, la capacité de poursuivre leurs propres objectifs au sein de leur nation conformément à leurs propres croyances, exprimées dans leur langue, en bref, l'autodétermination, est un droit qui leur a été refusé. L'exercice de l'autodétermination des Premières Nations exige la pleine reconnaissance des titres, des compétences et des droits inhérents, des questions qui vont au-delà du mandat du comité. Il faudra aussi atteindre l'autosuffisance grâce à la liberté financière, administrative et de gouvernance qui soutient l'autodétermination. Ces questions sont l'objet d'une nouvelle relation financière.

Les gouvernements des Premières Nations, en collaboration avec leurs citoyens, définiront le bien-être à leur façon, établiront leurs propres priorités et mèneront leurs activités comme bon leur semble. Ce faisant, ils préserveront le mode de vie que la création leur a destiné. Les besoins et les attentes varieront d'une Première Nation à l'autre et les progrès seront mesurés en fonction de leurs valeurs et aspirations. Le gouvernement du Canada fait de même avec les Canadiens, et pour les Canadiens. Toutefois, pour faciliter et appuyer l'établissement d'une relation financière efficace entre les Premières Nations et le Canada, il faut un ensemble d'attentes communes, ce qui suppose des priorités communes, des stratégies conjointes et des mesures collectives d'amélioration continue.

Un ensemble d'attentes que le Canada et les Premières Nations partagent à l'égard d'une nouvelle relation financière peut être défini comme étant l'amélioration des conditions de vie des citoyens des Premières Nations et la réduction de l'écart avec lequel ils sont aux prises sur le plan socioéconomique. Le premier ministre et le chef national de l'Assemblée des Premières Nations ont souvent parlé de ce but, et cela sert bien l'objectif. Un ensemble mesurable de résultats qui peuvent être définis et comparés et faire l'objet d'un suivi de façon coordonnée permet aux 2 parties de définir leurs rôles et d'assumer leurs responsabilités respectives. Le Canada et les Premières Nations sont mutuellement responsables de l'atteinte de cet objectif. Bien que les gouvernements des Premières Nations aient le droit à l'autodétermination, le Canada est responsable de la création du système défaillant actuellement en place ainsi que de la collecte des données erronées (par exemple, le Registre des Indiens et les données des programmes de Services aux Autochtones Canada) qui ont été, et qui sont toujours, à l'origine de discours profondément trompeurs et de décisions qui laissent grandement à désirer. Le Canada contrôle actuellement la plupart des structures de gouvernance et des structures juridiques qui pourraient permettre de tracer une meilleure voie pour l'avenir et il dispose des ressources financières nécessaires pour financer les solutions.

Les conditions auxquelles sont confrontées de nombreuses Premières Nations, l'inégalité qui existe entre les Canadiens et les citoyens des Premières Nations sur le plan du bien-être et la nécessité de renforcer la capacité financière des gouvernements des Premières Nations exigeront des investissements, mais cela procurera des avantages considérables tant pour les citoyens des Premières Nations que pour la population canadienne. Les avantages économiques de l'investissement dans les Premières Nations et leur développement économique comprennent la création d'emplois pour les citoyens des Premières Nations et les Canadiens, la réduction des coûts sociaux et de santé, une activité économique accrue pour les Premières Nations et le Canada et une hausse des recettes fiscales pour tous les ordres de gouvernement. Le comité est d'avis qu'en travaillant sur l'établissement d'une nouvelle relation financière de la manière recommandée, cela procurera des avantages aux citoyens des Premières Nations et aux Canadiens, les économies interdépendantes des Premières Nations et du Canada connaîtront une croissance plus rapide et plus vaste grâce à une meilleure synergie et les coûts découlant des inégalités existantes seront réduits. Le résultat juste est aussi le meilleur résultat pour toutes les parties concernées.

2. Vision du comité pour une nouvelle relation financière

Le comité envisage un avenir où les relations entre la Couronne et les Premières Nations seront fondées sur le respect et la confiance, un avenir où les relations de nation à nation respecteront l'esprit et l'intention originaux des traités. Ces relations de nation à nation englobent nécessairement les relations financières qui fournissent aux Premières Nations les moyens de financer leurs activités autonomes et d'améliorer le bien-être de leurs nations, de leurs collectivités et de leurs citoyens en maintenant le mode de vie que la création leur a destiné. Pourtant, ces relations financières ne peuvent profiter aux Premières Nations de façon isolée. Il est primordial de respecter les traités et de reconnaître les titres, les compétences et les droits inhérents des Premières Nations pour leur permettre de tirer pleinement parti d'une relation financière. Les gouvernements des Premières Nations devront bénéficier d'un soutien adéquat, y compris une main-d'œuvre possédant les compétences et les aptitudes appropriées ayant accès à des possibilités régulières de formation et de perfectionnement; un soutien institutionnel fourni par les institutions des Premières Nations ainsi que le temps suffisant pour acquérir les capacités nécessaires à la croissance de leur économie et à l'excellence dans la prestation des services publics et l'infrastructure.

Pour assurer la responsabilité mutuelle de la mise en œuvre de la relation financière et de la réduction des écarts socioéconomiques, les Premières Nations et le Canada devront s'engager à mesurer fidèlement les conditions de vie et les résultats socioéconomiques des Premières Nations et à présenter des rapports à ce sujet. Pour faire en sorte qu'une attention soutenue soit accordée à la réduction des écarts socioéconomiques, les institutions des Premières Nations devront recueillir et communiquer des données et des statistiques, et évaluer et vérifier les approches, les processus et les structures.

Dans le cadre de ses travaux, le comité a examiné les relations financières sous l'angle des systèmes de croyances et des valeurs des Premières Nations. Le comité a jugé utile d'évaluer comment les relations financières actuelles entrent en conflit avec les enseignements et les valeurs des Premières Nations, et de déterminer comment une nouvelle relation financière pourrait mieux répondre à ces enseignements.

Évaluation des relations financières en fonction des valeurs des Premières NationsNote de bas de page 1
  Vision pour une nouvelle relation financière Relation financière actuelle
La vérité
Parler seulement selon ce que nous avons vécu ou expérimenté
Une nouvelle relation financière doit être fondée sur la vérité ainsi que sur des renseignements pertinents et crédibles, conformes à la fois aux visions occidentales et autochtones du monde. Pour ce faire, il faudra que les Premières Nations aient le contrôle des données et de l'obtention des résultats et qu'elles aient une responsabilité partagée à cet égard. Les fonctionnaires fédéraux contrôlent les données et l'information et ils peuvent donc contrôler le récit, de sorte que la vérité n'est pas toujours révélée.
L'humilité
Se reconnaître comme une infime partie de la création
Les parties à une nouvelle relation financière doivent faire preuve d'humilité, abandonner les processus coloniaux et paternalistes et se considérer comme des partenaires égaux. Le Canada prend des décisions unilatérales concernant le fonctionnement des gouvernements des Premières Nations et la vie des citoyens des Premières Nations, ce qui est arrogant et paternaliste.
Le respect
Honorer toute la création
Une nouvelle relation financière doit respecter les droits inhérents et issus de traités des Premières Nations, leurs titres, leurs compétences et leurs pouvoirs, de même que leurs responsabilités envers tous leurs citoyens. Les droits inhérents et issus de traités, les titres et les compétences des Premières Nations sont ignorés en raison de la souveraineté proclamée du Canada, ce qui est irrespectueux.
L'amour
Connaître l'amour, c'est connaître la paix
Les gouvernements et les institutions des Premières Nations agiraient avec amour en choisissant de faire passer les intérêts et les besoins des citoyens et des collectivités des Premières Nations en premier lorsqu'ils prennent des décisions. Les intérêts, les besoins, les croyances et les valeurs des Premières Nations ne sont pas pris en considération lors de l'allocation des ressources et de la prise de décisions touchant les Premières Nations, ce qui témoigne d'un manque d'amour.
L'honnêteté
Mener sa vie avec intégrité
Toutes les parties à la relation agiraient honorablement, notamment en faisant preuve d'honnêteté dans leurs rapports mutuels et de transparence dans leurs processus décisionnels. Les nouveaux investissements fédéraux visent souvent à promouvoir les intérêts et les priorités du gouvernement fédéral, et pas nécessairement ceux des Premières Nations, ce qui est hypocrite et malhonnête.
Le courage
Faire face à la vie avec bravoure
Le Canada et les Premières Nations feraient preuve de courage et prendraient les décisions difficiles que nous craignions de prendre auparavant. Les fonctionnaires fédéraux évitent les décisions difficiles nécessaires pour assurer une répartition équitable des ressources et des possibilités entre les régions et les collectivités, ce qui témoigne d'un manque de courage.
La sagesse
Chérir la connaissance
Le Canada et les Premières Nations doivent faire preuve de sagesse, en s'appuyant sur les objectifs des générations antérieures et en tenant compte des intérêts des générations futures, et en reconnaissant que les investissements dans le renforcement des capacités et de la résilience des membres et des collectivités des Premières Nations profitent aux Premières Nations et à tous les Canadiens. Les politiques colonialistes sont blessantes et nuisibles et elles limitent la participation des Premières Nations à la prise de décisions ayant une incidence sur leur développement social, économique et culturel, ce qui témoigne d'un manque de sagesse.

3. Principes financiers proposés par le comité

Le comité propose un ensemble de principes financiers pour orienter la conception et la mise en œuvre d'une nouvelle relation financière.

Respect des traités : La relation financière doit respecter l'esprit et l'intention des traités des Premières Nations tout en contribuant à ce que le Canada respecte et exécute ses obligations prévues dans les traités.Note de bas de page 2

Autonomie : La relation financière doit respecter l'autonomie des gouvernements des Premières Nations pour contribuer à l'avancement de leurs priorités en matière d'autodétermination. Cela comprend la liberté de prendre des décisions sur la manière dont ils fournissent des services publics et la capacité d'allouer leurs ressources financières, avec la permission de leurs citoyens.

Durabilité : La relation financière doit aider les Premières Nations à poursuivre leur développement économique. Les Premières Nations ont droit à une part équitable de la croissance économique à laquelle elles contribuent.

Suffisance : La relation financière doit assurer aux gouvernements des Premières Nations un financement suffisant pour fournir les services publics et l'infrastructure nécessaires pour répondre aux besoins, améliorer les conditions de vie, combler les écarts socioéconomiques et assurer le bien-être de leurs nations, collectivités et citoyens, et apporter des ajustements réguliers pour suivre l'évolution de la population, l'inflation et d'autres facteurs de coût.

Prévisibilité : La relation financière doit assurer un financement prévisible et à long terme aux gouvernements des Premières Nations afin de faciliter la planification et la prestation des services publics et de l'infrastructure. Cela exigera des mesures et des évaluations fondées sur des données probantes ainsi que des améliorations continues.

Responsabilisation : La principale relation de responsabilité doit être la relation entre les citoyens des Premières Nations et leurs gouvernements. Le Canada et les Premières Nations sont mutuellement responsables du succès d'une nouvelle relation financière.

Objectivité : Les formules de financement et les mécanismes qui soutiennent l'établissement de la relation financière doivent faciliter une mise en œuvre fidèle, respecter l'intention de la relation et ne pas nuire au développement social, politique, juridique, environnemental, économique et technologique.

Efficacité : La conception de la relation financière et de ses approches et mécanismes de soutien doivent assurer l'efficacité de la mise en œuvre.

4. Le bien fondé du changement

L'expérience et la recherche montrent que le financement ne peut à lui seul améliorer les conditions de vie et les résultats socioéconomiques des Premières Nations. Seule l'autodétermination, c'est-à-dire l'exercice d'un pouvoir décisionnel autonome et la capacité fiscale de le faire, peut renverser les écarts socioéconomiques croissants que connaissent les Premières Nations, leurs collectivités et leurs membres. Les expériences documentées des Premières Nations ainsi que des recherches respectées (par exemple, le projet mené à l'Université Harvard sur le développement des Indiens d'Amérique (non disponible en français) et la Commission royale sur les peuples autochtones, entre autres) font ressortir quatre conditions pour la réalisation d'un changement transformateur pour les Premières Nations. Il s'agit de :

Là où ces conditions sont présentes, les Premières Nations du Canada ainsi que les peuples autochtones des États-Unis, de la Nouvelle-Zélande et de l'Australie connaissent habituellement des progrès remarquables. Prenons, à titre d'exemple, les Premières Nations qui ont conclu des ententes sur l'autonomie gouvernementale avec des règlements de revendications territoriales globales (c'est-à-dire, restitution des terres ou indemnisation pour les terres). Grâce à l'accès à un meilleur financement et à une plus grande autodétermination, ces nations ont créé des institutions culturellement appropriées et ont réalisé des gains notables en ce qui a trait au revenu familial (30 % pour les hommes et 28 % pour les femmes)Note de bas de page i et à la participation à un emploi à temps plein (7 % pour les hommes et 6 % pour les femmes).Note de bas de page ii

La Première Nation de Miawpukek, à Terre-Neuve, a également réalisé des gains sensibles sur le plan socioéconomique lorsqu'elle a obtenu son autonomie financière grâce à une entente de subvention, dans les années 1980. Au cours de la décennie qui a suivi l'établissement d'une relation financière fondée sur les subventions (c'est-à-dire, de 1986 à 1996), la Première Nation de Miawpukek a réussi à améliorer considérablement le bien-être de sa collectivité,Note de bas de page 3 passant de résultats bien inférieurs à ceux des collectivités non autochtones voisines à des résultats bien supérieurs à ceux des collectivités non autochtones voisines.Note de bas de page iii

Le meilleur argument en faveur de l'autodétermination et de l'autonomie financière est peut-être le suivant : s'il existe de nombreux exemples d'autodétermination et d'autonomie financière ayant mené à de meilleurs résultats, il n'existe toutefois pas d'exemples clairs de cas où ces éléments ont entraîné une détérioration des résultats.

Il n'est pas surprenant qu'il y ait peu d'exemples de Premières Nations qui ont réalisé des gains sur le plan socioéconomique au cours du siècle qui a mené à l'affirmation des droits des Autochtones par l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Les droits issus de traités et les droits inhérents ont toujours été bafoués, et le statut de nation et l'autodétermination des Premières Nations ont été entravés d'innombrables façons. Il n'est pas non plus étonnant que les nations historiques et les groupes visés par les traités aient lutté pour rétablir leurs formes traditionnelles de gouvernance ainsi que pour construire des formes de gouvernance contemporaines et culturellement appropriées. Bien que les relations de nation et de parenté des Premières Nations aient perduré, les lois fédérales et provinciales ainsi que les politiques connexes ont systématiquement entravé la gouvernance et la collaboration en dehors des formes de gouvernance imposées par la Loi sur les Indiens (sans aucune intrusion provinciale dans les champs de compétence des Premières Nations). De plus, aucune donnée significative n'a été recueillie, analysée ou distribuée concernant le bien-être des Premières Nations, ce qui rend encore plus difficile la mesure ou la comparaison des résultats socioéconomiques de cette époque.

Une autre raison évidente pour laquelle une nouvelle relation financière est nécessaire est que les relations colonialistes existantes et les approches programmatiques fédérales sont un échec lamentable. La proportion plus élevée de maladies, l'espérance de vie plus courte, les revenus moindres et les autres signes de désavantage socioéconomique qui touchent les citoyens des Premières Nations sont bien documentés. Les données du ministère de la Santé de l'Alberta montrent que l'espérance de vie des membres des Premières Nations est de 9,6 ans inférieure à celle des personnes qui n'appartiennent pas aux Premières Nations.Note de bas de page iv Les données de Statistique Canada montrent que les membres des Premières Nations qui ont un emploi ont un revenu inférieur de 34 % à celui des Canadiens non autochtones et, malgré les nombreux obstacles économiques, sociaux et professionnels auxquels se heurtent les membres des Premières Nations, 62,9 % d'entre eux ont un revenu d'emploi, comparativement à 71,5 % des Canadiens non autochtones.Note de bas de page v

L'effet intergénérationnel associé au fait de se faire enlever sa culture, sa terre, sa langue et sa signification en tant qu'être humain n'est pas bien compris. Cette réalité n'est pas une erreur, mais bien le résultat direct des politiques de la Couronne. La violation des traités, le vol de terres, l'extinction de sources de nourriture, le dépouillement de la culture et de la langue, l'interdiction des activités économiques, sociales, éducatives et spirituelles, la famine délibérée et le génocide culturel sont parmi les actions qui ont créé les conditions actuelles. Fondamentalement, le déni des droits inhérents et issus de traités, des titres fonciers et de la compétence assurait la subordination des Premières Nations au pouvoir colonial, et il continue de le faire aujourd'hui. En raison de l'incapacité du Canada à appuyer l'autodétermination, tant sur le plan juridique que financier, les Premières Nations ne sont pas en mesure de réaliser les progrès socioéconomiques que connaît le Canada de façon plus générale, et les écarts socioéconomiques continuent de se creuser.

Il existe d'autres arguments économiques solides en faveur d'une nouvelle relation financière. Les avantages possibles d'une nouvelle relation financière pour les Premières Nations et les Canadiens sont importants. Étant donné que la population autochtone est celle qui, au Canada, est la plus jeune et croît le plus rapidement, on estime que jusqu'à 21 % de toute la croissance de la population active (c'est-à-dire, les personnes en mesure de travailler) pourrait éventuellement en provenir, à condition que les écarts sur le plan de la participation des Autochtones au marché du travail soient comblés. De plus, on estime qu'en comblant seulement les écarts liés au niveau d'études et à la participation au marché du travail entre les Canadiens et les citoyens des Premières Nations, on ajouterait 36,4 milliards de dollars au produit intérieur brut.Note de bas de page vi Comme la Commission royale sur les peuples autochtones l'a souligné il y a plus de 30 ans, les occasions perdues et les dépenses consacrées aux programmes sociaux correctifs qui découlent de l'inégalité existante surpassent les sommes actuellement consacrées annuellement à tous les programmes et services destinés aux Premières Nations. En outre, plus la participation à l'économie dans son ensemble sera grande, tant à l'échelle nationale qu'internationale, plus la coopération économique sera efficiente et efficace.

5. Bâtir la confiance par l'honneur, le respect et la réparation

Les relations actuelles de nation à nation entre les Premières Nations et le Canada sont profondément et fatalement imparfaites. Les traités ne sont pas respectés, les droits inhérents des Premières Nations ne sont pas respectés, les titres fonciers ne sont pas reconnus et l'indemnisation pour les terres qui ont été irrémédiablement perdues ne peut être obtenue que par des litiges ou d'autres processus entièrement contrôlés par la Couronne. Les lois fédérales, provinciales et territoriales s'appliquent sur les terres des Premières Nations et aux citoyens des Premières Nations sans leur consentement, niant ainsi la compétence des gouvernements des Premières Nations. Même le droit des gouvernements des Premières Nations d'identifier leurs propres citoyens est refusé. Au Yukon et dans les Territoires du Nord-Ouest, cette situation intenable est d'autant plus grave que les politiques de transfert des responsabilités et les ententes de transfert de responsabilités du Canada ne prévoient aucun financement pour les gouvernements des Premières Nations, traitant les gouvernements territoriaux comme les pouvoirs décisionnels légitimes des citoyens des Premières Nations.

Les Premières Nations et le Canada ont une vision distincte et autonome du monde. Cela inclut des conceptions très différentes de l'importance et des rôles des êtres humains. La vision du monde généralement adoptée par les Premières Nations est que les êtres humains sont les intendants de la terre, qu'il existe une obligation spirituelle et morale de protéger la terre et les ressources pour tous les êtres vivants, et que la richesse s'accumule pour la collectivité. La vision occidentale du monde veut que les terres puissent appartenir aux humains, que les terres et les ressources soient disponibles au bénéfice des êtres humains, au-dessus des autres êtres vivants, et que la richesse soit accumulée pour le profit personnel. De tels clivages théoriques créent entre les cultures une distance qui contribue à créer des vides dans les lois et les politiques. Comme les lois et les politiques du Canada reflètent et imposent en grande partie sa vision occidentale du monde – et que les lois fédérales et provinciales empiètent sur les pouvoirs des Premières Nations en matière de souveraineté, d'élaboration et d'application des lois, et souvent les font passer en second lieu – d'importants obstacles nuisent au mode de vie et d'existence des Autochtones. Lorsque rien n'est fait, ces différences mènent à des stéréotypes, à des préjugés systémiques à l'égard des membres des Premières Nations, et au racisme.

Les tentatives passées d'améliorer les relations entre la Couronne et les Premières Nations ont entraîné des changements progressifs qui n'ont pas réussi à endiguer les écarts croissants observés dans les résultats socioéconomiques. En général, ces efforts n'ont pas permis de régler les problèmes sous-jacents qui entravent l'autodétermination et les progrès des Premières Nations. Le comité est d'avis qu'un changement transformationnel est nécessaire pour réaliser le changement souhaité et rétablir la confiance à l'égard des relations entre la Couronne et les Premières Nations. Ce changement comprend essentiellement la mise en œuvre des appels à l'action de 2015 de la Commission de vérité et réconciliation du Canada et la reconnaissance et la correction des erreurs du passé qui ont causé des torts spirituels et ancestraux, car rien ne peut être accompli sans reconnaître et corriger les actions de la Couronne qui ont causé une érosion de la confiance et du respect.

Avec la confiance vient la possibilité de dialogue, de coopération et de pensée novatrice. Pour les raisons susmentionnées et bien d'autres, la confiance à l'égard des relations entre la Couronne et les Premières Nations s'est profondément érodée. Il faudra beaucoup de travail, de persévérance et de temps pour établir la confiance nécessaire à l'obtention de véritables relations de nation à nation. Bien qu'une nouvelle relation financière aidera en soi à bâtir la confiance dans les relations entre la Couronne et les Premières Nations, les obstacles doivent être éliminés avant qu'une nouvelle relation financière puisse progresser véritablement.

5.1 Le respect des traités et des obligations financières du Canada liées aux traités

En ce qui concerne les droits issus de traités, de nombreuses Premières Nations ont exprimé leur consternation devant le peu d'attention accordée par le Canada à la mise en œuvre de ses obligations découlant des traités. Bien que le processus de règlement des revendications particulières et la mise en œuvre des droits fonciers issus des traités dans les traités modernes progressent lentement, de nombreuses autres Premières Nations travaillent d'arrache-pied depuis des générations pour que leurs traités historiques soient respectés. D'autres Premières Nations n'ont pas été en mesure de ratifier avec le Canada des traités modernes qui respectent et honorent leurs droits, titres et compétences. Les problèmes liés aux traités sont vastes et comprennent :

  • l'omission de livrer les terres promises;
  • les arpentages fonciers erronés;
  • l'octroi non autorisé de privilèges à des tiers (par exemple, lignes électriques et transfert des droits sur les ressources aux provinces);
  • l'empiétement sur des terres et des ressources non cédées et sur des réserves (par exemple, inondations non autorisées pour la production d'hydroélectricité);
  • le non-respect des promesses relatives aux services de santé et à l'éducation;
  • le défaut de tenir les engagements pris envers des Premières Nations ayant accepté de partager leurs terres au titre d'un traité.

Dans le cas des Premières Nations qui sont parties à des négociations ou à des litiges de longue date avec les sociétés d'État fédérales et provinciales en vue d'obtenir la reconnaissance et le respect de leurs droits issus de traités, il sera difficile d'avancer vers une nouvelle relation financière. L'incapacité persistante des gouvernements fédéraux et provinciaux à respecter les traités a mené à une méfiance qui est maintenant profondément enracinée. Pour ces nations signataires d'un traité, des engagements et des mesures tangibles sont nécessaires pour rétablir la confiance et créer les conditions nécessaires à l'établissement d'une nouvelle relation financière. Il s'agira notamment d'accélérer le règlement des revendications particulières (c'est-à-dire, les revendications relatives à des traités non honorés), de conclure les droits fonciers issus de traités, de restituer les terres de la Couronne provinciale et fédérale aux Premières Nations et d'accélérer les ajouts aux processus des réserves.

  • Recommandation 1 : Le comité recommande que le Canada entreprenne honorablement des discussions avec les titulaires de droits des Premières Nations afin de concilier les différentes interprétations de l'esprit et de l'intention des traités et de s'entendre sur les obligations financières du Canada en vertu des traités (c'est-à-dire, hors des tribunaux et du processus des revendications particulières).

5.2 Reconnaissance des droits inhérents, du titre et de la compétence

Le gouvernement du Canada s'est engagé à renouveler une relation de nation à nation avec les peuples autochtones, fondée sur la reconnaissance des droits, le respect, la coopération et le partenariat, et ancrée dans les principes de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. En mai 2016, le ministre des Affaires autochtones et du Nord a annoncé que le Canada appuyait pleinement, et sans réserve, la déclaration.

Les articles 3 et 4 de la déclaration décrivent les droits inhérents des Nations autochtones à l'autodétermination et à l'autonomie fiscale.

Article 3 de la déclaration : Les peuples autochtones ont le droit à l'autodétermination. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel.

Article 4 de la déclaration : Les peuples autochtones, dans l'exercice de leur droit à l'autodétermination, ont le droit d'être autonomes et de s'administrer eux-mêmes pour tout ce qui touche à leurs affaires intérieures et locales, ainsi que de disposer des moyens de financer leurs activités autonomes.

Les Premières Nations possèdent de nombreux autres droits inhérents qui ont été confirmés par les tribunaux du Canada, notamment :

  • le droit de conclure des traités;
  • le titre ancestral sur les terres;
  • le droit aux ressources et aux activités;
  • le droit à l'autonomie gouvernementale;
  • le droit de pratiquer leur culture, leurs coutumes et leur langue, entre autres.

Lorsque la Loi constitutionnelle de 1867 a établi les pouvoirs fédéraux et provinciaux aux articles 91 et 92, elle a laissé de côté les droits inhérents et les pouvoirs législatifs des Premières Nations. L'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 du Canada visait à corriger cette situation en reconnaissant les droits inhérents existants des Premières Nations, mais n'a pas réglé immédiatement les questions relatives à la compétence des Premières Nations. Depuis plus d'un siècle, les lois et les politiques du Canada entravent et empêchent l'exercice des droits inhérents par les Premières Nations, et l'incursion des provinces dans les champs de compétence des Premières Nations a compliqué les choses davantage.

À l'heure actuelle, en termes pratiques, la Couronne prétend détenir toutes les terres des Premières Nations, que ce soit à l'ordre fédéral ou provincial. Il n'existe pas à l'intention des Premières Nations de régime de titres fonciers qui appuient l'intendance et les obligations des Premières Nations à l'égard des terres.

Pour la plupart des Premières Nations, la Couronne fédérale prétend détenir les terres en vertu du paragraphe 91(24) de la Loi constitutionnelle du Canada, à titre de « terres réservées aux Indiens ».

Dans le cas des Premières Nations qui ont conclu des ententes sur l'autonomie gouvernementale avec le Canada et qui détiennent des terres hors réserve, les terres sont détenues en fief simple et enregistrées par l'entremise des systèmes provinciaux d'enregistrement foncier, conformément à l'article 92 de la Loi constitutionnelle du Canada. Dans une décision rendue en 2014 dans l'affaire Nation Tsilhqot'in c. Colombie-Britannique, la Cour suprême du Canada a statué que « Le titre ancestral confère au groupe autochtone le droit d'utiliser et de contrôler le territoire, et de bénéficier des avantages qu'il procure ». Dans l'affaire Delgamuukw c. Colombie-Britannique en 1997, la Cour suprême du Canada a affirmé que « les terres détenues en vertu d'un titre aborigène comportent une composante économique inéluctable qui montre que l'indemnisation est également un facteur pertinent à l'égard de la question de la justification ». Il n'existe pas encore de structure distincte pour la reconnaissance et l'enregistrement du titre des Premières Nations.

Les Premières Nations de tout le Canada soutiennent que leurs ressources ont été volées par le biais de transferts illégaux de droits sur les ressources aux provinces. La Loi constitutionnelle de 1867 accordait des droits de gestion des ressources naturelles à l'Ontario, au Québec, au Nouveau-Brunswick et à la Nouvelle-Écosse. Les droits sur les ressources dans les autres provinces ont été conservés par le gouvernement fédéral lorsque ces provinces sont entrées dans le Dominion. Les lois subséquentes et successives sur le transfert des ressources naturelles ont transféré des droits sur les ressources aux provinces de l'Ouest dans les années 1930, sans consultation des Premières Nations et sans tenir compte des droits issus des traités et du titre des Premières Nations. À titre d'exemple, certains traités des Premières Nations convenaient du partage des terres jusqu'à la profondeur de labour seulement et ne faisaient aucune référence au partage ou à la cession de droits souterrains par les Premières Nations, alors que d'autres traités ne parlaient pas du tout de terres. Au cours des dernières années, certaines provinces ont conclu des ententes de partage des recettes pour certaines ressources naturelles et d'autres activités (p. ex. le jeu et le tabac), mais il reste encore beaucoup à faire.

La compétence des Premières Nations est le droit d'adopter et d'appliquer des lois dans un domaine. Le paragraphe 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867 confère au Parlement fédéral le pouvoir exclusif de légiférer sur les questions relatives aux Premières Nations. Bien que la Loi constitutionnelle de 1982 reconnaisse et confirme les droits existants des Premières Nations à l'article 35, elle ne définit ni n'énumère ces droits. Malgré l'article 35, la Loi sur les Indiens continue d'empiéter sur les compétences des Premières Nations dans les domaines de la citoyenneté, de la gestion des terres et de la gestion des fonds, entre autres. Il existe d'innombrables lois, politiques et structures au sein des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux qui entravent la compétence des Premières Nations. Le Canada s'est engagé à améliorer les lois et politiques qui portent atteinte aux droits des Autochtones, mais peu de progrès ont été réalisés à cet égard.

Bien que les progrès soient très lents dans tous ces domaines (respect des traités et reconnaissance et respect des droits inhérents, du titre et de la compétence), ils existent néanmoins. Le projet de loi C-92 du gouvernement fédéral, qui propose de reconnaître les droits des peuples autochtones dans le domaine de la protection de l'enfance, est un exemple d'engagement à l'égard de la reconnaissance des droits. Le projet de loi C-92 vise à reconnaître les droits inhérents et la compétence des Nations autochtones sur les services à l'enfance et à la famille (c'est-à-dire, la protection de l'enfance). La reconnaissance des droits et de la compétence dans ce domaine public et dans bien d'autres est nécessaire pour que les gouvernements des Premières Nations puissent exercer pleinement leur autonomie et améliorer les conditions de vie et d'autres résultats socioéconomiques de leurs Nations, collectivités et citoyens.

  • Recommandation 2 : Le comité recommande que le ministre collabore avec ses collègues fédéraux pour veiller à ce que les titres, les compétences et les droits inhérents des Premières Nations soient honorés, reconnus, respectés et protégés par tous les ordres de gouvernement. Au minimum, cela devrait inclure l'application des principes de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones à toutes les lois fédérales, provinciales et territoriales. Il faudrait accorder la priorité à la reconnaissance des compétences et des droits inhérents des Premières Nations dans les domaines de la gouvernance, des systèmes judiciaires, de la citoyenneté, des titres de propriété relatifs aux terres et aux ressources ainsi que des services publics et sociaux essentiels.

5.3 Règlement et résolution des revendications et des questions relatives aux terres et aux traités

Il est largement reconnu que les Premières Nations ont besoin de possibilités accrues de création de richesse. Les Premières Nations ont de la difficulté à exploiter le potentiel économique de leurs territoires et à générer des revenus qui contribueraient à favoriser le développement économique. La réponse commence par la terre. Comme l'a souligné la Commission royale sur les peuples autochtones, les Premières Nations ont besoin de terres pour reconstruire leur Nation, de terres pour se sentir chez elles, d'un lieu ayant une signification culturelle et spirituelle, de terres permettant des activités traditionnelles comme la chasse et le piégeage, de terres et de ressources pour assurer leur autonomie économique et pour contribuer considérablement au financement de l'autonomie gouvernementale.Note de bas de page vii

Pour que les Premières Nations s'engagent dans une nouvelle relation financière, de nation à nation, elles voudront voir des progrès sur les questions relatives aux traités et aux terres. Cela comprend :

  • le respect de l'esprit et de l'intention des engagements en vertu des traités;
  • la mise à jour des annuités;
  • la réparation des violations des traités;
  • la restitution des terres publiques fédérales et provinciales à leurs propriétaires légitimes;
  • l'indemnisation des Premières Nations pour les terres cédées à tort à des intérêts privés;
  • la mise en œuvre des droits fonciers issus du traité;
  • la reconnaissance des titres des Premières Nations sur les territoires non cédés;
  • l'accélération des ajouts aux réserves;
  • la négociation des revendications particulières;
  • la négociation des revendications territoriales.

Lorsque des règlements liés aux traités et de nouvelles revendications territoriales sont établis, ils doivent l'être dans l'esprit d'une mise en œuvre honorable des traités, et non dans le but sous-jacent d'éteindre les droits et titres des Premières Nations ou de soustraire la Couronne aux revendications actuelles ou futures relatives aux traités.

  • Recommandation 3 : Le comité recommande que le ministre s'engage avec la ministre des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord et d'autres collègues fédéraux à collaborer avec les provinces en vue du règlement des revendications territoriales, de la ratification des ententes de partage des revenus, de la restitution des terres publiques fédérales et provinciales, la mise en œuvre des droits fonciers issus de traités, l'accélération du processus d'ajouts aux réserves, la reconnaissance des titres fonciers non cédés des Premières Nations et la création d'un régime de gestion des terres qui permet à celles-ci de détenir des titres de propriété et d'assumer leurs responsabilités en matière d'intendance de leurs terres.

6. Croissance des économies, capacité financière et prospérité des Premières Nations

Le fait que la plupart des gouvernements des Premières Nations souffrent d'une capacité financière extrêmement lacunaire n'est pas remis en doute. Pour les raisons énoncées précédemment dans le présent rapport, les Premières Nations n'ont pas accès aux terres, aux ressources et aux possibilités de développement économique nécessaires pour accroître leurs propres revenus et prospérer. L'impact du sous-financement chronique des gouvernements des Premières Nations, y compris l'érosion graduelle du pouvoir d'achat que procurent les transferts au fil des décennies, a été souligné à maintes reprises par les tribunaux, les organisations des droits de la personne et les institutions fédérales. Seuls les gouvernements des Premières Nations peuvent améliorer les conditions de vie de leurs citoyens, mais ils doivent avoir la capacité financière nécessaire pour le faire, y compris des transferts suffisants, prévisibles et à long terme.

Les conseils et les recommandations du comité sont axés sur les relations entre la Couronne et les Premières Nations, y compris les mesures que le Canada doit prendre pour éliminer les obstacles aux activités de développement des Premières Nations. Bien qu'il existe de nombreuses possibilités que les Premières Nations peuvent souhaiter saisir au sein de leur nation, et suivant les traités, le statut de nation et les liens ancestraux, ces questions relèvent de la seule discrétion de chaque nation et n'étaient pas au centre des travaux du comité.

6.1 Soutenir la croissance économique et la prospérité des Premières Nations

Les écarts économiques importants que connaissent les Premières Nations sont bien documentés, notamment les faibles niveaux d'emploi, les écarts de revenu importants et les niveaux relativement faibles de participation dans les industries d'extraction et de récolte des ressources. Comme l'a souligné la vérificatrice générale du Canada dans une étude de 2003, « rétrécir cet écart contribuerait à atténuer la pauvreté chez les Autochtones, réduisant ainsi le coût social et financier qui y est associé ».

Certaines Premières Nations ont connu des succès remarquables au chapitre de la croissance économique, des entreprises et des emplois, mais beaucoup d'autres luttent pour surmonter les obstacles qui freinent la croissance économique et la participation à la population active. Les obstacles à la croissance comprennent les revendications territoriales non résolues, l'ingérence dans les titres fonciers et les droits relatifs aux ressources, le manque de coopération de la part des provinces et territoires, l'accès lacunaire au capital financier, le manque de soutien favorisant le développement économique, l'incapacité d'appliquer les régimes réglementaires et un accès limité aux avantages en matière d'emploi et d'approvisionnement, entre autres. Le comité a noté que ces obstacles existent à la fois pour les projets de développement locaux et pour la participation autochtone à des projets d'intérêt national et régional (par exemple, les grands projets énergétiques et d'extraction des ressources).

La faible participation des Premières Nations à ces grands projets a mené à des échecs et à des retards très médiatisés qui sont à la fois coûteux et embarrassants pour le Canada. Ces projets avortés ont nui aux perspectives économiques des Premières Nations et des Canadiens, y compris la perte de revenus et d'emplois et la dépendance accrue à l'égard des services sociaux, des programmes de soutien du revenu et des services de santé mentale.

Le comité envisage une série de mesures pour créer les conditions nécessaires à la croissance économique des Premières Nations. Ces conditions comprennent :

  • un contrôle accru exercé par les Premières Nations sur leurs terres et leurs ressources;
  • des ententes de partage des recettes gouvernementales;
  • des ententes sur les répercussions et les avantages pour l'industrie et le gouvernement;
  • un soutien à la planification du développement économique;
  • un soutien aux organismes qui aident les Premières Nations.

Ces mesures pourraient s'appuyer sur celles qui ont déjà été prises par le gouvernement fédéral dans les domaines de la gestion des terres, de l'extraction du pétrole et du gaz et du financement par emprunt dans le secteur privé. Le comité estime qu'il faut consolider et uniformiser les transferts du gouvernement fédéral pour le développement économique des Premières Nations et prévoir des investissements équitables par rapport aux sommes investies par le gouvernement fédéral dans le développement économique et les infrastructures des collectivités et des entreprises non autochtones. Le comité estime également que les Premières Nations doivent être consultées, prises en compte et incluses dans les décisions et les mesures relatives au développement et au commerce.

Le comité note qu'il existe de nombreux obstacles à la participation de la main-d'œuvre et à l'entrepreneuriat chez les Premières Nations, et pas seulement un manque de possibilités économiques et d'emplois dans les collectivités des Premières Nations. Ces autres obstacles comprennent, entre autres :

  • des lacunes en matière d'alphabétisation et d'éducation;
  • une discrimination systémique;
  • des logements inadéquats;
  • des problèmes de santé mentale non traités;
  • des traumatismes non traités et non reconnus;
  • des lacunes dans le transport;
  • peu de services de garde abordables.

Bien que les conseils et les recommandations du comité ne soient pas directement axés sur ces questions cruciales, ces dernières doivent être reconnues et résolues pour que les Premières Nations prospèrent et assurent le bien-être de leurs nations, de leurs collectivités et de leurs citoyens. Le comité est d'avis que les questions qui relèvent des gouvernements des Premières Nations seront réglées par l'autodétermination et l'autonomie financière. Le Canada et la population canadienne devront également faire des progrès dans l'élimination des obstacles – afin d'éliminer les obstacles instillés par une discrimination qui dure depuis des générations à l'endroit des membres des Premières Nations. Les appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation du Canada contiennent des recommandations à cet égard.

  • Recommandation 4 : Le comité recommande que le ministre collabore avec ses collègues fédéraux afin d'adopter une approche fédérale cohérente et consolidée pour financer et appuyer le développement économique et l'infrastructure économique des Premières Nations, et de faire en sorte que les investissements soient équitables par rapport aux sommes investies par le gouvernement du Canada dans les collectivités et les entreprises non autochtones.
  • Recommandation 5 : Le comité recommande que le ministre collabore avec ses collègues fédéraux et, au besoin, avec les provinces et les territoires, pour assurer aux Premières Nations une place appropriée dans le cadre des processus décisionnels sur les projets de développement économique qui touchent leurs territoires ainsi qu'une part équitable du développement auquel elles contribuent.
  • Recommandation 6 : Le comité recommande que le ministre collabore avec ses collègues fédéraux et, au besoin, avec les provinces et les territoires, pour veiller à ce que les entreprises et les membres des Premières Nations aient un accès équitable aux marchés publics et aux possibilités d'emploi.
  • Recommandation 7 : Le comité recommande que le ministre collabore avec ses collègues fédéraux pour faire avancer les travaux visant à accroître la reconnaissance et la protection par le gouvernement fédéral de la compétence fiscale des Premières Nations, conformément à leurs droits inhérents.
  • Recommandation 8 : Le comité recommande que les mesures, les lois, les politiques, les directives, les accords ou les autres documents juridiques envisagés dans le cadre d'une nouvelle relation financière n'abrogent ou ne transgressent en aucune façon les titres, compétences ou droits inhérents ou issus de traités des Premières Nations.

6.2 Veiller à ce que les gouvernements des Premières Nations disposent d'un financement suffisant pour l'administration, la gouvernance et la prestation des services publics

Le comité note que le gouvernement fédéral doit investir davantage pour s'assurer que les gouvernements des Premières Nations disposent des capacités financières et de gouvernance nécessaires pour s'attaquer à leurs priorités en matière de développement et pour que leurs services publics et leurs infrastructures contribuent pleinement aux conditions de vie et au bien-être de leurs nations, de leurs collectivités et de leurs citoyens. Cela comprend un financement suffisant pour la prestation, la mesure et la surveillance de la qualité et du rendement, l'évaluation de l'efficacité et de l'efficience ainsi que l'adaptation et l'amélioration continues des programmes et services. Il faut également modifier les ententes de financement fédérales qui restreignent l'exercice de l'autonomie par les gouvernements des Premières Nations et qui augmentent les coûts de prestation des services. Plus particulièrement, ces restrictions comprennent des exigences de programme inutiles qui étouffent l'innovation dans la prestation des services publics et l'infrastructure, des exigences excessives en matière de conformité et de rapports qui consomment la capacité des fonctionnaires des Premières Nations, et des restrictions financières qui limitent la capacité des Premières Nations de servir tous leurs citoyens (c'est-à-dire, aucun financement pour les citoyens vivant hors réserve et pour les citoyens sans statut).

Le comité note qu'il est très complexe de déterminer les besoins de financement des Premières Nations pour la prestation des services publics et l'infrastructure. De plus, des niveaux de financement comparables à ceux observés à l'échelle des provinces ne suffiraient pas pour permettre aux Premières Nations d'éliminer les déficits accumulés dans les services et les conditions de vie, ni de combler les écarts dans les résultats socioéconomiques. L'établissement des niveaux de financement des Premières Nations en fonction de programmes et de niveaux de soutien comparables à ceux des provinces est imparfait pour de nombreuses autres raisons. Premièrement, les programmes provinciaux ne sont pas conçus pour répondre aux besoins distincts des Premières Nations et ne sont pas nécessairement la meilleure voie à suivre pour assurer le bien-être d'une Première Nation donnée, de ses collectivités et de ses citoyens. Deuxièmement, la promotion et le financement de programmes particuliers peuvent nuire à l'autodétermination des Premières Nations en limitant la façon dont les fonds sont dépensés et en ne reconnaissant pas les besoins ou les priorités distincts de chaque Première Nation. Troisièmement, le financement axé sur les programmes ne tient pas compte du fait que les Premières Nations ont droit à une juste part de la richesse générée par leurs terres et leurs ressources et du développement économique auquel elles contribuent. Pour ces raisons, le comité décourage un financement considéré sous l'angle des programmes fédéraux.

En ce qui concerne les services publics et l'infrastructure, le comité a une vision transformationnelle qui comprend un régime facultatif de transferts législatifs. Ces transferts législatifs devraient être suffisants pour fournir aux gouvernements des Premières Nations les moyens financiers d'assurer le bien-être de leurs nations, collectivités et citoyens et de combler les écarts au chapitre des résultats socioéconomiques. La vision du comité en matière de transferts législatifs est décrite à la section 6.3. Reconnaissant qu'il faudra plusieurs années pour mettre en œuvre les transferts législatifs, le comité estime également qu'il faut augmenter immédiatement le financement pour appuyer la prestation des services publics et l'infrastructure ainsi que les activités d'administration et de gouvernance des gouvernements des Premières Nations.

Dans l'immédiat, le comité encourage la poursuite des discussions sectorielles (c'est-à-dire, la santé, le logement, l'infrastructure communautaire, les services sociaux, l'éducation, etc.) en vue de remédier aux lacunes dans le financement destiné à la prestation de services publics, au logement et à l'infrastructure des collectivités.

En ce qui concerne les activités générales de gouvernance et d'administration des gouvernements des Premières Nations, le comité estime qu'il faut augmenter immédiatement le financement, en se fondant sur les meilleurs renseignements disponibles. Bien que de nombreuses études portant particulièrement sur les Premières Nations et des études internes de Services aux Autochtones Canada aient examiné les coûts de la gouvernance des Premières Nations, aucune étude indépendante et exhaustive des coûts n'a été effectuée pour établir les besoins et quantifier les écarts de financement dans ce domaine. Néanmoins, il est tout à fait clair que le financement est nettement insuffisant. Les calculs de base effectués à l'aide des statistiques et des données financières publiques du gouvernement fédéral montrent que le financement accordé aux gouvernements des Premières Nations pour les dépenses générales de gouvernance et d'administration est, par habitant, 6 fois moins élevé que celui du gouvernement fédéral pour ces dépenses, 3 fois moins élevé que celui des gouvernements provinciaux et des administrations locales et plus de 20 fois moins élevé que celui dont disposent les administrations territoriales.

Statistique Canada recueille des données sur les coûts des « services publics généraux » des administrations fédérales, provinciales, territoriales et locales au Canada. Lorsque ces statistiquesNote de bas de page viii les plus récentes ont été publiées, en 2017, les frais administratifs généraux du gouvernement fédéral étaient de 1 425 $ par habitant. Les chiffres inscrits aux tableaux financiers du Plan ministériel de Services aux Autochtones Canada pour l'exercice financier de 2019 à 2020 indiquent des dépenses prévues de 316 millions de dollars pour les programmes appuyant la gouvernance autochtone. Si nous estimons de façon prudente que 80 % de ce financement sera versé aux gouvernements des Premières Nations, le financement des frais généraux d'administration et de gouvernance des Premières Nations est de 259 $ par habitant, sur la base des chiffres du recensement de 2016 sur la population des Premières Nations.

  • Recommandation 9 : Le comité recommande que des hausses de financement soient accordées immédiatement aux gouvernements des Premières Nations pour couvrir les coûts généraux d'administration publique et de gouvernance (c'est-à-dire, en fonction des meilleurs renseignements disponibles).
  • Recommandation 10 : Dans le cadre de consultations soutenues des Premières Nations, le comité recommande que le Canada et les Premières Nations entreprennent une étude approfondie sur les coûts afin de déterminer les niveaux de financement dont les Premières Nations ont besoin pour couvrir leurs frais généraux d'administration et de gouvernance.

6.3 Assurer un financement suffisant, prévisible et à long terme au moyen de transferts législatifs facultatifs

Le comité envisage une nouvelle relation financière dans le cadre de laquelle les Premières Nations admissibles pourraient opter pour un régime de transferts législatifs. Ces transferts législatifs seraient suffisants pour permettre aux gouvernements des Premières Nations de fournir les services publics et l'infrastructure nécessaires pour améliorer les conditions de vie, assurer le bien-être et combler les écarts au chapitre des résultats socioéconomiques pour leurs nations, leurs collectivités et leurs citoyens – peu importe le lieu de résidence ou le statut. Des examens périodiques dans le cadre d'un processus national coordonné permettraient de s'assurer que les niveaux de financement demeurent suffisants. Les détails des transferts législatifs et des formules de financement devraient être déterminés avec les Premières Nations et intégrés à la loi fédérale afin de conférer les pouvoirs nécessaires au gouvernement fédéral. Des ententes administratives seraient nécessaires (c'est-à-dire, des ententes entre les Premières Nations, les provinces, les territoires et les administrations locales) pour faciliter la coordination de la prestation des services et de la facturation pour les citoyens des Premières Nations qui reçoivent des services à l'extérieur de leur collectivité et pour les services fournis par les Premières Nations aux non-citoyens. La mise en œuvre d'un tel régime nécessiterait probablement des négociations multilatérales entre le gouvernement fédéral, les gouvernements des Premières Nations et les provinces.

Pour en arriver à la conclusion que les transferts législatifs doivent faire partie de la nouvelle relation financière, le comité a noté que le gouvernement du Canada ne peut être légalement autorisé par le Parlement du Canada à transférer des fonds que de deux façons, à savoir par la voie de transferts législatifs et par la voie de transferts non législatifs. Les transferts législatifs sont préautorisés par l'entremise d'une loi habilitante et ne nécessitent pas un vote annuel du Parlement ni de décision d'affectation de fonds par un ministère fédéral. Toutefois, les transferts non législatifs nécessitent un vote annuel du Parlement (c'est-à-dire, suivant le processus budgétaire et les lois de crédits) et sont généralement subordonnés aux décisions d'affectation de fonds des ministères fédéraux.

Le comité a constaté que, bien qu'environ les deux tiers des paiements de transfert versés par le gouvernement du Canada soient des transferts législatifs, presque tous les transferts aux Premières Nations sont non législatifs. La principale exception concerne les transferts aux Premières Nations ayant conclu des ententes sur l'autonomie gouvernementale, lesquelles sont visées par les lois fédérales. Le comité note que les transferts législatifs fournissent aux gouvernements bénéficiaires un financement plus prévisible et à plus long terme (c'est-à-dire, que les transferts législatifs sont habituellement autorisés pour une période de 5 à 10 ans). Il convient de noter que, bien qu'une partie du financement non législatif actuel accordé aux Premières Nations soit transférée conformément à des ententes à long terme tout le financement prévu dans ces ententes peut être modifié à tout moment. Les transferts législatifs sont plus prévisibles et plus stables parce que les niveaux de financement ne peuvent être modifiés qu'au moyen d'une loi du Parlement qui abroge ou modifie la loi habilitante. Bien qu'il soit toujours possible pour un futur gouvernement fédéral d'adopter une telle loi, des changements ne peuvent être apportés sans un débat hautement politisé au Parlement et dans les médias.

Le comité a examiné les régimes de paiements de transfert utilisés au Canada (c'est-à-dire, pour les transferts fédéraux aux provinces et aux territoires) et dans d'autres pays où des transferts législatifs fondés sur des formules étaient utilisés pour calculer le montant des transferts aux administrations infranationales. Le comité a constaté qu'il existe des approches intéressantes en matière de paiements de transfert en Suède, en Norvège, en Allemagne et en Australie – toutes conçues spécialement pour répondre au contexte particulier de chaque pays. Ces régimes de transferts législatifs comprenaient une formule de financement fondée sur des facteurs démographiques, des facteurs culturels et linguistiques, des indicateurs socioéconomiques et des différences structurelles entre les régions. Bien que ces régimes visaient à corriger les inégalités entre les régions, aucun n'était conçu pour permettre l'autodétermination et combler les écarts au chapitre des résultats socioéconomiques.

Le comité est d'avis que le modèle des transferts législatifs aux Premières Nations, y compris les différentes enveloppes de financement et les formules de financement connexes, devrait être conçu avec soin pour tenir compte de la diversité des Premières Nations du Canada (par exemple, besoins et défis socioéconomiques divers, structures de coûts différentes, niveaux variés d'accès aux possibilités de développement économique, etc.).

De plus, le comité note que de nombreux groupes visés par les traités ont des différends de longue date avec le Canada au sujet de l'interprétation des obligations du Canada en vertu des traités. Le comité croit que bon nombre de ces différends se régleront probablement d'eux-mêmes si les transferts législatifs de base sont suffisants pour répondre à tous les besoins des citoyens des Premières Nations. Néanmoins, il se peut que certains droits financiers issus de traités ne soient pas satisfaits par les transferts législatifs, et le comité voit la possibilité d'un financement supplémentaire fondé sur les traités pour les titulaires de droits issus de traités afin de s'assurer que tous ces droits soient respectés. De plus, le comité estime que le Canada doit reconnaître que de tels transferts font partie de ses obligations juridiques internationales envers les Premières Nations en vertu des traités.

Sous réserve d'un engagement soutenu, le comité suggère que les Premières Nations et le Canada envisagent un régime de transferts fiscaux législatifs comportant 5 éléments :

  1. Transferts de base pour financer les services publics, la gouvernance politique et administrative, le logement, l'infrastructure communautaire et l'administration de la justice. Ces transferts seraient prévus par la loi, fondés sur une formule et conçus pour fournir aux gouvernements des Premières Nations un financement de base suffisant pour répondre aux besoins de tous leurs citoyens. Ces transferts donneraient aux Premières Nations les moyens financiers de s'autodéterminer dans leur quête du bien-être de leurs citoyens et de leurs collectivités. Plus précisément, la formule devrait tenir compte de la population de la Première Nation, des caractéristiques démographiques de ses citoyens, de sa situation géographique, de sa masse continentale et de divers autres facteurs influant sur les coûts.
  2. Transferts de péréquation structurelle en complément des transferts de base pour les Premières Nations dont les besoins financiers sont plus élevés. Ces transferts seraient prévus par la loi et versés aux Premières Nations qui ont des dépenses nécessaires exceptionnellement élevées ou dont le niveau de développement économique faible. Ces transferts pourraient tenir compte d'un large éventail de circonstances (par exemple, écarts importants sur le plan des résultats socioéconomiques, lacunes dans l'infrastructure communautaire, taux élevés de maladies, coûts de l'éloignement, dispersion de la population, niveaux de développement économique, coûts de prestation par habitant extraordinairement élevés, conditions environnementales défavorables, coûts liés aux changements climatiques, etc.).
  3. Transferts supplémentaires fondés sur les traités pour remplir les obligations de la Couronne qui découlent des traités et qui ne sont pas remplies au moyen des transferts de base et de péréquation structurelle. Les Premières Nations signataires d'un traité auraient à décider si ces transferts devraient être législatifs, et ainsi exiger une loi fédérale, ou non législatifs.
  4. Transferts de gestion des urgences et des crises pour financer les dépenses réelles engagées par les Premières Nations pour se préparer aux urgences et aux crises (par exemple, catastrophes naturelles, crises sanitaires et urgences sociales), les atténuer, y réagir et s'en remettre.
  5. Rajustements annuels à tous ces transferts pour suivre le rythme de la croissance de la population des Premières Nations, de l'inflation et d'autres facteurs de coût. Le comité envisage un facteur de croissance qui assure aux Premières Nations des rajustements de financement qui seraient fonction de la croissance du produit intérieur brut du Canada.

Avant d'adopter un régime de transferts législatifs, les citoyens des Premières Nations s'attendront probablement à ce que leurs gouvernements respectifs aient mis en place certaines capacités, certaines structures et certains processus. De plus, le Canada et les gouvernements des Premières Nations devront mettre en place des lois, des politiques et des structures pour appuyer le déploiement des transferts législatifs. Une fois ces éléments fondamentaux en place, le comité envisage les transferts législatifs comme une nouvelle option de financement que les Premières Nations et leurs gouvernements peuvent explorer, s'ils le souhaitent et chacun à son propre rythme. Le comité estime qu'il est nécessaire que les Premières Nations qui participent à un régime de transferts législatifs acceptent de transmettre des données sur leurs conditions de vie et d'autres résultats, et qu'elles soient prêtes à travailler avec un vérificateur général des Premières Nations. Ces engagements sont nécessaires pour appuyer l'amélioration continue de la relation financière et sont expliqués plus en détail aux sections 8.2 et 9.2, respectivement.

  • Recommandation 11 : Le comité recommande que les Premières Nations et le gouvernement du Canada élaborent un régime de transferts législatifs facultatifs à l'intention des gouvernements des Premières Nations. Le comité recommande également que l'admissibilité aux transferts législatifs soit liée à la volonté des Premières Nations de recueillir et d'échanger des statistiques sur les conditions de vie et d'autres résultats et de se soumettre à des vérifications de gestion effectuées par un vérificateur général des Premières Nations.

7. Renforcer les organismes des Premières Nations qui appuient les Premières Nations

7.1 Investir dans les organismes qui appuient les Premières Nations

Tous les gouvernements, organismes et professionnels très performants tirent parti des formes de soutien institutionnel. Cela comprend la formation, les tribunes d'échange des connaissances, la mise en commun des meilleures pratiques et des conseils et services pour lesquels les Premières Nations ne peuvent maintenir les capacités en interne. Par exemple :

  • programmes de formation interne pour les professionnels et les gens de métier;
  • surveillance des réseaux d'aqueduc et d'égout;
  • expertise juridique et technique pour poursuivre des projets de développement économique et négocier des ententes sur les répercussions et les avantages;
  • conception et hébergement des systèmes d'information;
  • exécution de tâches financières et juridiques complexes;
  • conception de processus et systèmes de prestation de programmes.

Bon nombre d'organismes et de fournisseurs de services des Premières Nations ont vu le jour pour répondre à ces besoins, mais la plupart ne disposent pas du financement de base et de la coordination nécessaires pour réaliser pleinement leur potentiel.

Les programmes fédéraux visant à soutenir le développement professionnel et institutionnel, bien qu'ils n'aient jamais été suffisants, se sont érodés et le financement a été réorienté vers d'autres priorités. Bien que certains organismes des Premières Nations aient réussi à devenir autosuffisants malgré des déficits de financement, beaucoup d'autres sont chroniquement sous-financés et ont de la difficulté à maintenir les effectifs de base. Pour s'assurer que les gouvernements des Premières Nations disposent du soutien dont ils ont besoin pour être autonomes, les organismes des Premières Nations ont besoin d'un financement et d'un soutien stables. De plus, bon nombre des organismes existants sont contraints, aux termes de leurs ententes de financement, de se concentrer sur les Premières Nations établies à l'intérieur des frontières d'une province ou d'une petite région géographique, ce qui laisse de nombreuses autres Premières Nations sans services.

Dans l'immédiat, le comité estime qu'il y a un besoin urgent de financement de base stable pour les organismes non politiques qui fournissent un soutien au renforcement des capacités aux gouvernements des Premières Nations, en s'éloignant du financement fondé sur des propositions et limité dans le temps. Ces investissements sont nécessaires pour attirer et maintenir en poste le personnel qualifié nécessaire pour fournir un soutien de haut calibre aux gouvernements des Premières Nations.

De plus, le comité voit l'occasion de mieux tirer parti des organismes des Premières Nations pour appuyer les gouvernements des Premières Nations qui vivent des situations de crise et de détresse. À l'heure actuelle, la Politique de prévention et de gestion des manquements de Services aux Autochtones Canada établit les protocoles et les démarches pour traiter les situations où les gouvernements des Premières Nations sont en difficulté. Le comité estime qu'il faut abolir cette politique colonialiste et assurer la transition de ces services de soutien vers les organismes des Premières Nations.

Les citoyens des Premières Nations méritent des services publics de grande qualité. Les gouvernements disposant de ressources suffisantes ont recours à des régimes d'évaluation, de gestion de la qualité et d'attestation pour assurer la qualité continue et l'amélioration continue de la prestation des services publics. Ces soutiens sont généralement obtenus auprès d'associations spéciales et d'organismes de certification et d'accréditation respectés. Le manque d'accès aux mesures de soutien de cette nature nuit à la capacité des gouvernements des Premières Nations d'atteindre l'excellence dans la prestation de services publics.

De plus, certaines Premières Nations n'ont pas les économies d'échelle nécessaires pour gouverner, gérer et fournir des services publics de façon efficiente et efficace. Au cours des dernières années, des compressions ont touché certains organismes (par exemple, conseils de bande, conseils tribaux et divers autres organismes des Premières Nations) qui fournissent des services aux gouvernements des Premières Nations n'ayant pas les moyens de maintenir des capacités techniques et administratives en interne. La réalisation d'économies d'échelle relativement aux coûts administratifs et de gestion peut libérer des ressources limitées pour la prestation des services publics. Des services et des modèles de prestation novateurs sont nécessaires pour réaliser ces économies d'échelle (c'est-à-dire, modèles de services partagés, arrangements administratifs impartis, systèmes et services hébergés, solutions technologiques, achats et investissements globaux, etc.).

  • Recommandation 12 : Le comité recommande que, dans l'immédiat, un financement suffisant et stable soit fourni aux institutions existantes qui appuient le renforcement des capacités des gouvernements et des professionnels des Premières Nations, notamment en délaissant le financement fondé sur des propositions et fourni pour une durée limitée.
  • Recommandation 13 : Le comité recommande qu'une stratégie soit élaborée avec les Premières Nations afin de renforcer et d'élargir la portée des institutions qui offrent aux gouvernements des Premières Nations des services de soutien au renforcement des capacités et à la prestation de services impartis ainsi que des services d'accréditation et d'évaluation de programmes. Il sera important que cette stratégie et ces institutions aient une portée nationale pour s'assurer que les besoins de toutes les Premières Nations soient satisfaits.
  • Recommandation 14 : Le comité recommande que le ministre abolisse la Politique de prévention et de gestion des manquements de Services aux Autochtones Canada, y compris le recours à des séquestres-administrateurs, et qu'il la remplace par un système de soutien au renforcement des capacités sous la responsabilité des institutions des Premières Nations.

7.2 Repenser la répartition du financement de base entre les institutions non politiques

L'approche actuelle qui consiste à laisser le gouvernement fédéral dicter quels organismes des Premières Nations reçoivent du financement est intenable. Seules les Premières Nations peuvent cerner les besoins et imaginer les occasions et les possibilités qui s'offrent aux organismes des Premières Nations. Seules les Premières Nations peuvent tenir leurs organismes responsables et s'assurer qu'ils continuent d'offrir un soutien de grande qualité aux gouvernements et aux particuliers des Premières Nations. Lorsque ces institutions sont minées par les décisions politiques et budgétaires du gouvernement fédéral, des conséquences tragiques peuvent en résulter pour les gouvernements et les citoyens des Premières Nations. Pour ces raisons et d'autres encore, une nouvelle approche est nécessaire.

Voici quelques options de distribution des fonds aux organismes non politiques qui offrent un soutien aux Premières Nations :

  • Option 1 : transferts sont distribués par l'entremise d'un organisme et d'un processus des Premières Nations à l'échelle nationale;
  • Option 2 : les transferts sont versés aux gouvernements des Premières Nations, lesquels ils allouent des fonds aux organismes qu'ils choisissent d'appuyer;
  • Option 3 : une approche mixte selon laquelle le financement de base est distribué au moyen d'un processus national et des fonds supplémentaires sont versés par les gouvernements des Premières Nations (par exemple, frais de formation, conférences, services, etc.).

Bien que chacune de ces approches ait un certain mérite, le comité préfère de loin la troisième option. Celle-ci assure la stabilité des organismes des Premières Nations tout en veillant à ce qu'ils adaptent continuellement leurs offres de services pour répondre aux besoins de leurs clients. Le comité s'attend à ce que certaines Premières Nations constatent qu'un organisme national et un processus d'attribution du financement de base nuisent à leur autonomie. Bien que cela puisse être vrai dans une certaine mesure, le comité estime qu'il est essentiel que les Premières Nations collaborent pour s'assurer que des organismes stables et compétents sont en place pour servir toutes les Premières Nations. Le comité souligne qu'une telle approche n'empêche pas le processus national de distribuer des fonds aux organismes régionaux, lorsqu'il s'agit de l'approche privilégiée.

Le comité note également que les institutions des Premières Nations ont besoin d'un financement stable et prévisible, qui augmente avec le temps et qui est protégé contre les compressions budgétaires discrétionnaires du gouvernement fédéral. Cela pourrait être réglé par une loi fédérale qui autorise les transferts législatifs à un organisme national des Premières Nations et assure une augmentation annuelle en fonction la croissance du produit intérieur brut du Canada ou aux dépenses totales du gouvernement fédéral.

Enfin, un régime d'examen et de vérification sera nécessaire pour s'assurer que les organismes des Premières Nations rendent entièrement des comptes aux gouvernements et aux citoyens des Premières Nations. Le comité recommande que tout organisme des Premières Nations qui reçoit des fonds dans le cadre d'un processus national fasse l'objet d'un examen et d'une vérification par un vérificateur général des Premières Nations (voir recommandation 21).

  • Recommandation 15 : Le comité recommande que le financement de base des institutions non politiques des Premières Nations soit calculé, alloué et distribué par un organisme national des Premières Nations dans le cadre d'un processus contrôlé par les Premières Nations qui sera établi avec celles-ci. De plus, le comité recommande que le gouvernement fédéral adopte une loi autorisant un transfert législatif à cet organisme national et prévoyant des augmentations annuelles du financement liées au produit intérieur brut du Canada.

8. Mesurer les résultats des Premières Nations et en rendre compte

Le comité envisage une nouvelle relation financière fondée sur le partage des responsabilités et la responsabilité mutuelle. Un partenariat dans le cadre duquel les Premières Nations et le Canada se partagent la responsabilité d'améliorer le bien-être des Premières Nations et de combler les écarts socioéconomiques avec lesquels sont aux prises les membres et les collectivités des Premières Nations. Les Premières Nations et le Canada seraient mutuellement responsables l'un envers l'autre du respect de leurs engagements respectifs. Les relations de responsabilité mutuelle sont fondées sur des objectifs et des priorités mutuellement convenus, des indicateurs de rendement clairement définis et des rapports crédibles fondés sur des données probantes concernant les résultats obtenus.

8.1 Mesure des écarts socioéconomiques et rapports sur leur atténuation

Un engagement commun à améliorer les conditions de vie des citoyens des Premières Nations et à combler leurs écarts au chapitre des résultats socioéconomiques exige une définition claire des résultats communs que les parties conviennent de chercher à atteindre. À cette fin, le comité estime qu'il est nécessaire d'établir des buts et des objectifs nationaux, élaborés conjointement par les Premières Nations et le Canada, pour guider la réduction des écarts socioéconomiques et améliorer les conditions de vie des Premières Nations. Un tel cadre permettrait aux Premières Nations et au Canada d'établir des objectifs et des cibles et de se tenir mutuellement responsables des investissements et des progrès nécessaires pour les atteindre. Ce cadre ne limiterait ni n'empêcherait en aucune façon les gouvernements des Premières Nations d'élaborer leurs propres objectifs, buts et indicateurs. L'investissement dans le renforcement des capacités, l'ajout de capacités et le développement de systèmes devrait permettre à chaque gouvernement des Premières Nations de réaliser des progrès à l'échelle locale et de gérer la relation financière de façon plus générale.

Comme le décrit le Centre de gouvernance de l'information des Premières Nations, l'autonomie de définir le mieux-être communautaire et le droit des Premières Nations à la propriété, au contrôle, à l'accès et à la possession (ou principes de PCAP® des Premières Nations, une marque déposée du Centre de gouvernance de l'information des Premières Nations) de renseignements sur leurs peuples est « fondamentalement liée à l'autodétermination ainsi qu'à la préservation et au développement de leur culture ». Le Centre de gouvernance de l'information des Premières Nations décrit les principes de PCAP® comme un ensemble de normes qui établissent comment les données des Premières Nations doivent être recueillies, protégées, utilisées ou communiquées. Ils servent de point de repère sur la façon de travailler avec les Premières Nations lorsqu'il s'agit de leurs renseignements. Selon les principes de PCAP®, les Premières Nations ont le contrôle des processus de collecte de données dans leurs communautés et il leur appartient de contrôler la façon dont cette information peut être utilisée (voir l'annexe B pour plus de détails).

Partout au pays, les Premières Nations s'efforcent de parvenir au bien-être et d'atteindre les objectifs qu'elles se sont fixés elles-mêmes au moyen de processus communautaires, nationaux et fondés sur des traités. Le comité estime qu'il est impératif que la définition et la mesure des indicateurs axés sur les résultats au niveau national n'interfèrent pas avec ces processus importants, mais les appuient et agissent en coordination avec eux. Le comité note que, bien qu'un cadre national d'indicateurs soit essentiel pour faire progresser la relation financière et mesurer son efficacité, ce cadre n'aurait pas d'incidence sur la capacité des Premières Nations de déterminer elles-mêmes leurs propres objectifs, résultats et indicateurs pour atteindre le bien-être.

Le comité considère principalement les objectifs nationaux et les indicateurs axés sur les résultats comme un moyen pour le Parlement et les Premières Nations de tenir le gouvernement du Canada responsable de l'acquittement de ses responsabilités. Il permet d'effectuer des mesures, des recherches et des évaluations générales sur l'efficacité des relations financières entre la Couronne et les Premières Nations. Il sert à mesurer dans quelle mesure les relations financières contribuent à combler les écarts entre les Canadiens et les citoyens des Premières Nations au chapitre des résultats socioéconomiques, et à signaler aux Premières Nations et au Canada les cas où des investissements supplémentaires ou des modifications aux relations financières sont nécessaires.

Un processus conjoint entre les Premières Nations et le Canada est fondamental pour l'élaboration d'un cadre national d'indicateurs axés sur les résultats. Les indicateurs actuels du bien-être communautaire et individuel au Canada reposent sur une vision du monde non autochtone. Les indicateurs des résultats des Premières Nations doivent refléter les façons de voir, de savoir et de comprendre des Premières Nations. Les indicateurs doivent refléter le mode de vie que la création leur a destiné, y compris leur rôle d'intendance des terres, des eaux et de tous les êtres vivants.

Pour en arriver à la conclusion qu'un cadre d'indicateurs axé sur les résultats est nécessaire, le comité a examiné d'autres méthodes pour définir et mesurer le rendement des relations financières. Ces autres méthodes comprenaient la comparabilité des niveaux de financement (par exemple, assurer des niveaux de financement égaux), la comparabilité des niveaux de service (par exemple, l'accès aux services offerts dans les territoires voisins, leur type et leur nature) et la comparabilité des résultats (par exemple, le nombre de patients ayant subi un dépistage de la maladie, le nombre d'étudiants fréquentant l'école). Le comité a conclu qu'aucune de ces autres mesures de comparabilité n'assurerait une attention soutenue à l'amélioration du bien-être des Premières Nations et à la réduction des écarts socioéconomiques, car aucune ne mesure les conditions de vie et le bien-être des Premières Nations, de leurs collectivités et de leurs citoyens.

Le comité a examiné les cadres de durabilité et de résultats à l'échelle internationale, nationale et des collectivités des Premières Nations et a dégagé certains thèmes communs. Le comité a constaté que les objectifs de développement durable des Nations Unies et d'autres cadres comprenaient systématiquement des objectifs et des indicateurs dans les domaines de la santé et du bien-être, de la protection des citoyens vulnérables, de l'éducation, de la croissance économique durable, de la protection et de la préservation de l'environnement, des infrastructures publiques et de la sécurité. Les cadres autochtones mettaient également l'accent sur la culture et la langue. Le comité encourage le Canada et les Premières Nations à tenir compte de ces cadres existants dans l'établissement d'objectifs et d'indicateurs communs et à tenir compte de l'appel à l'action no 19 de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, qui propose des domaines d'intérêt pour les indicateurs liés à la santé.

Le comité note que certains principes directeurs seraient utiles pour appuyer l'engagement national et l'élaboration conjointe d'objectifs et d'indicateurs. À titre d'exemple, les principes pourraient inclure des énoncés comme les suivants :

  • doivent refléter la vision du monde des Premières Nations et s'y harmoniser;
  • les Premières Nations et le Canada doivent s'entendre sur les objectifs, les cibles et les échéanciers;
  • bien que les régions et les Nations fixent et définissent leurs propres buts et objectifs, les Premières Nations tirent un grand avantage de l'existence d'un ensemble de buts et d'objectifs définis à l'échelle nationale qui sont définis et mesurés de façon uniforme par toutes les Premières Nations;
  • le nombre d'objectifs, de cibles et d'indicateurs doit être réduit au minimum afin de ne pas imposer un fardeau injustifié de collecte de données aux peuples et aux gouvernements des Premières Nations;
  • il est très avantageux d'avoir des cibles et des indicateurs qui permettent des comparaisons avec les populations non autochtones, le cas échéant;
  • pour permettre l'établissement de statistiques sur le sexe, la diversité et l'inclusion, il est nécessaire de recueillir des données sur le sexe, les handicaps, l'origine ethnique, la région et d'autres caractéristiques du genre;
  • les buts, les cibles et les indicateurs doivent être revus et affinés périodiquement afin d'en assurer la pertinence continue et d'en tirer le maximum d'avantages.
  • Recommandation 16 : Le comité recommande que les Premières Nations et le Canada établissent des objectifs, des cibles et des échéanciers nationaux pour améliorer les conditions de vie et combler les écarts socioéconomiques que connaissent les membres et les collectivités des Premières Nations, notamment en matière de santé et de bien-être, d'éducation, de protection des citoyens vulnérables, de croissance économique durable, d'environnement, d'infrastructure publique, de sécurité, de langue et de culture. Cela nécessitera des indicateurs axés sur les résultats pour permettre aux Premières Nations et au Canada de mesurer l'atteinte de leurs objectifs communs et d'en rendre compte. Le comité recommande en outre que les Premières Nations et le Canada établissent des principes directeurs pour orienter ces efforts.

8.2 Collecte des données à l'appui de la mesure des conditions de vie et des résultats socioéconomiques des Premières Nations

Des données statistiques et administratives seront nécessaires pour mesurer, surveiller et rendre compte de la réalisation des buts et objectifs communs. Plus important encore, les Premières Nations et leurs institutions ont besoin de données pour appuyer la prestation efficace et efficiente des services publics, la reddition de comptes à leurs citoyens et leurs propres activités de recherche et d'évaluation. Le Centre de gouvernance de l'information des Premières Nations travaille avec des groupes des Premières Nations de tout le pays à l'élaboration d'une stratégie nationale de gouvernance des données afin d'établir une vision pour faire progresser la souveraineté des Premières Nations en matière de données, conformément aux principes de PCAP®.

Le Centre de gouvernance de l'information des Premières Nations et les dirigeants des Premières Nations dans le domaine de la souveraineté en matière de données préconisent que la meilleure façon pour les Premières Nations d'atteindre les principes de PCAP® consiste à gérer leurs propres données, mais cela n'est pas toujours possible. À l'heure actuelle, l'intendance des données des Premières Nations est compliquée par les lois provinciales et fédérales qui imposent des limites quant aux personnes qui peuvent détenir les données et à la façon dont les données peuvent être utilisées, limitant souvent l'accès des Premières Nations à leurs propres données. La Commission royale sur les peuples autochtones note que « [l]a collecte d'informations et leur utilisation ultérieure sont essentiellement de nature politique. Dans le passé, on ne demandait pas aux autochtones quelles informations il fallait recueillir, qui devrait s'en charger, qui devrait le tenir à jour, ni qui devait y avoir accès. Ces informations ne correspondaient pas nécessairement aux questions que se posaient les peuples autochtones, à leurs priorités et à leurs préoccupations ».Note de bas de page ix

Partout au pays, les Premières Nations collaborent avec les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux pour s'assurer que les obstacles à la gérance des données des Premières Nations et au de PCAP® sont éliminés et que leurs droits au consentement libre, préalable et éclairé sont protégés. Lorsque les Premières Nations ne peuvent rapatrier leurs données pour des raisons telles que la capacité et les limites juridiques, elles s'engagent dans des partenariats et des ententes juridiques avec les intendants actuels de leurs données pour faire respecter la gouvernance de ces données. Le Mécanisme d'experts des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones a fait remarquer que le droit au consentement préalable, libre et éclairé « est un principe que les peuples autochtones voient comme un des plus importants pour protéger leur droit à la participation. Il fait partie intégrante du droit à l'autodétermination. Le devoir des États d'obtenir le consentement préalable, libre et éclairé des peuples autochtones donne à ces derniers le droit de déterminer efficacement l'issue des décisions qui les concernent, et pas seulement le droit de participer » [traduction]. Le droit et la norme du consentement libre, préalable et éclairé s'appliquent dans tous les domaines, y compris la collecte, l'utilisation et la diffusion des données des Premières Nations.

Afin de promouvoir les principes de PCAP® et de s'assurer que le consentement préalable, libre et éclairé est respecté, le comité croit qu'il doit y avoir un organisme statistique national des Premières Nations, gouverné par les Premières Nations et indépendant. Cet organisme assumerait les responsabilités de Statistique Canada pour la collecte des données d'enquête et de recensement relatives aux citoyens, aux collectivités et au développement des Premières Nations. Le comité note qu'un organisme statistique national des Premières Nations est nécessaire pour assurer la comparabilité et la crédibilité des données statistiques à l'échelle nationale.

Pour en arriver à sa conclusion, le comité a tenu compte de la plus récente tentative d'établir un institut de la statistique des Premières Nations. L'Institut de la statistique des Premières Nations, créé en 2005, a vu son financement entièrement réduit et sa loi habilitante abrogée lorsqu'on a jugé qu'il n'avait pas réussi à apporter des changements significatifs. Le comité note que le fait que l'organisation n'ait pas réussi à définir et à mettre en œuvre rapidement une fonction statistique pour les Premières Nations a nui à sa pertinence. Un certain nombre de questions qui ont empêché le succès de l'Institut de la statistique des Premières Nations devraient être réglées pour assurer le succès du nouvel organisme. Premièrement, le conseil d'administration de l'institut , en tant que société d'État, a été nommé par le gouvernement du Canada, ce qui a nui à sa relation redditionnelle avec les citoyens des Premières Nations et leurs dirigeants. Deuxièmement, la dépendance de l'institut à l'égard du financement fédéral annuel a remis en question son indépendance de facto et, par conséquent, a miné sa crédibilité auprès des dirigeants des Premières Nations. Troisièmement, la loi instituant l'institut n'a pas abordé les questions fondamentales du droit fédéral et des systèmes de gouvernance (par exemple, l'institut était assujetti à la Loi sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels, ce qui est contraire aux PCAP®) ni les questions liées à l'harmonisation avec les institutions canadiennes existantes (par exemple, Statistique Canada n'était pas autorisé à remettre les données des Premières Nations à l'institut ni à composer avec le mandat de l'institut ou à s'aligner sur ce mandat), ce qui a empêché l'organisme d'obtenir un vaste soutien des dirigeants des Premières Nations.

Compte tenu de l'expérience de l'institut, il faut s'assurer que le nouvel organisme statistique des Premières Nations soit bien structuré, que les réformes nécessaires soient également apportées aux lois et aux institutions canadiennes et que son modèle de financement lui assure une indépendance de facto. De plus, compte tenu des capacités et de la crédibilité éprouvées de Statistique Canada, le comité voit une occasion de collaboration entre un nouvel organisme statistique des Premières Nations et Statistique Canada, et une occasion de tirer parti de l'expertise et de la capacité de Statistique Canada pour établir et mettre en œuvre la stratégie et les plans visant les statistiques des Premières Nations. Enfin, le comité note que, bien que l'objectif à long terme de tout organisme des Premières Nations soit d'être constitué et gouverné sous le régime du droit des Premières Nations, un tel régime juridique n'existe pas pour le moment. Dans l'immédiat, la gouvernance et l'indépendance du nouvel organisme statistique devront être assurées en vertu de la loi fédérale, et des mesures de protection réfléchies devront être mises en place pour s'assurer qu'il est gouverné par les Premières Nations, bien appuyé et politiquement indépendant (c'est-à-dire, pour veiller à ce qu'il soit en bonne position pour protéger les données des Premières Nations de tout accès ou usage non autorisé).

  • Recommandation 17 : Le comité recommande qu'un organisme national de la statistique des Premières Nations soit financé et chargé de travailler avec les Premières Nations à la définition, à la collecte, à l'analyse et à la diffusion de données statistiques relatives aux citoyens, aux collectivités et au développement des Premières Nations. Il faudra examiner attentivement la structure juridique, la gouvernance et le modèle de financement de cet organisme pour s'assurer qu'il soit administrée par les Premières Nations, qu'il bénéficie du soutien requis et qu'il demeure indépendant sur le plan politique.
  • Recommandation 18 : Le comité recommande d'accorder un financement permanent aux Premières Nations et de veiller à ce qu'elles soient soutenues dans leur quête de souveraineté en matière de gestion des données et à ce que les principes de propriété, de contrôle, d'accès et de possession (PCAPMD) soient respectés. Il faudra également modifier les lois, les institutions, les politiques, les fonds de données et les pratiques de gestion des données du gouvernement fédéral afin d'assurer l'harmonisation avec les principes de PCAP®, ce qui supposera de charger un organisme du gouvernement fédéral de la surveillance et de la conformité des ministères et organismes fédéraux.

9. Combler les écarts socioéconomiques une fois pour toutes

Le comité respecte l'enseignement de la vérité : ne parler que dans la mesure de ce que nous avons vécu ou expérimenté. De la même façon, la relation financière doit être continue et évoluer en fonction des données probantes tirées de l'expérience de sa mise en œuvre.

Pour qu'une nouvelle relation financière puisse réaliser son plein potentiel pour les générations futures, le comité estime qu'il faut des rapports, des examens, des évaluations et des activités d'amélioration continue réguliers. Des rapports sont nécessaires pour mettre en exergue les progrès réalisés dans l'avancement des relations financières entre la Couronne et les Premières Nations, ou l'absence de tels progrès, et pour faire la lumière sur les écarts dans les conditions de vie et les autres résultats socioéconomiques des Premières Nations. Des examens, des vérifications de gestion et des évaluations réguliers permettront de s'assurer que les problèmes, les écarts de rendement et les obstacles structurels sont systématiquement cernés au moyen de processus fondés sur des données crédibles. Toutes ces activités devront être bien orchestrées et coordonnées. Le comité est d'avis que les Premières Nations peuvent obtenir plus de pouvoir, d'influence et de succès lorsqu'elles s'unissent et utilisent une voix unifiée pour défendre leurs intérêts communs.

Ces activités importantes pourraient être exécutées par les organismes fédéraux existants du Canada (par exemple, le vérificateur général du Canada, le directeur parlementaire du budget du Canada, Services aux Autochtones Canada et d'autres), mais le comité estime qu'il est plus approprié que ce soit des organismes contrôlés par les Premières Nations qui appuient les gouvernements et les institutions des Premières Nations. Une participation et un contrôle accrus des Premières Nations favoriseront l'équilibre, l'objectivité, la confiance et l'authenticité des activités et de l'information qui en découle. Reconnaissant que de nombreuses Premières Nations préfèrent ne pas travailler avec ou par l'entremise des organismes nationaux des Premières Nations, le comité a examiné attentivement les diverses options offertes. Bien qu'il soit possible de créer des organismes des Premières Nations à l'échelle nationale et régionale, le comité a conclu qu'un tel régime minerait la force de la communauté et diminuerait grandement l'influence et le succès des Premières Nations. Le comité a conclu que des organismes nationaux non politiques seraient nécessaires pour réaliser le plein potentiel des relations financières entre la Couronne et les Premières Nations.

Le comité partait de l'idée que les relations entre la Couronne et les Premières Nations doivent être de nation à nation et reposer sur les traités. Il est essentiel que les structures et les processus institutionnels qui les sous-tendent favorisent ces relations et n'y nuisent pas. Ce principe s'applique aux structures et aux processus institutionnels qui soutiennent les relations financières. Le comité s'est montré résolu à respecter ce principe lorsqu'il a élaboré sa vision des processus et des structures institutionnels qui pourraient appuyer les relations financières entre la Couronne et les Premières Nations. De plus, le comité considère que la participation à une nouvelle relation financière, y compris les processus et les structures qui la soutiennent, est entièrement facultative pour les Premières Nations.

Le comité a examiné de près les processus et les structures institutionnelles qui seraient absolument essentiels à l'appui des relations financières. Bien qu'il ait cerné de nombreuses structures qui pourraient être bénéfiques, il a conclu que seulement trois d'entre elles seraient essentielles, notamment un organisme statistique des Premières Nations, un organisme responsable de la politique financière des Premières Nations et un vérificateur général des Premières Nations. La vision du comité à l'égard de ces institutions et de leurs fonctions est décrite à la section 7.2 pour l'organisme de la statistique des Premières Nations et dans les sections suivantes pour les autres.

9.1 Organisme responsable de la politique financière des Premières Nations pour la trésorerie, la coordination et une attention soutenue portée à la réduction des écarts

Le comité envisage une nouvelle relation financière qui sera évaluée et améliorée de façon continue. Cela nécessitera des recherches, des analyses et des évaluations régulières afin de cerner les enjeux et les défis et de proposer des solutions pour combler les écarts socioéconomiques et améliorer les conditions de vie des Premières Nations. Elle exigera également la présentation de rapports réguliers aux citoyens des Premières Nations et au Parlement du Canada pour s'assurer que des mesures sont prises en réponse aux problèmes cernés. À l'heure actuelle, ces fonctions sont assumées par le directeur parlementaire du budget, les conseils fédéraux de recherche et les fonctions d'évaluation des ministères fédéraux. Le comité est d'avis qu'un organisme responsable de la politique financière des Premières Nations doit coordonner ces activités avec les gouvernements des Premières Nations et les experts techniques, et pour eux.

Dans le cadre de ses fonctions courantes, cet organisme serait chargé de produire un rapport annuel à l'intention des citoyens des Premières Nations et du Parlement du Canada sur les mesures prises et les progrès réalisés pour combler les écarts socioéconomiques et améliorer les conditions de vie des Premières Nations. Pour s'assurer que l'attention voulue y est accordée, le comité estime qu'il est nécessaire d'adopter une loi fédérale exigeant que le premier ministre fasse rapport annuellement au Parlement du Canada sur les mesures prises et les résultats obtenus. Pour en arriver à la conclusion que le premier ministre devrait être chargé de faire rapport au Parlement, le comité a tenu compte de la récente mesure prise par le gouvernement fédéral pour rendre le ministre des Services aux Autochtones responsable des rapports annuels (c'est-à-dire, le projet de loi C-97, dont le Parlement est actuellement saisi). De plus, le comité note que le dirigeant de l'organisme chargé de la politique fiscale des Premières Nations est celui qui serait le mieux placé pour présenter le rapport de l'organisme aux chefs en assemblée chaque année, et à l'occasion d'autres réunions régionales des Premières Nations sur demande.

Le comité envisage également que cet organisme assume certaines fonctions de trésorerie, y compris la distribution du financement aux organismes non politiques des Premières Nations (c'est-à-dire, les organismes qui offrent des services à l'appui au renforcement des capacités et à l'ajout de capacités) et aux gouvernements des Premières Nations qui acceptent les transferts législatifs. De plus, le comité estime qu'une institution doit assurer la coordination entre les organismes et les activités d'une nouvelle relation financière, en réunissant les gens et l'information pour assurer une approche globale du processus, ce qui améliorera grandement les chances de succès.

Reconnaissant l'importance de la stabilité du mandat et du financement de l'organisme responsable de la politique financière des Premières Nations, le comité estime que l'organisme responsable de la politique financière devrait être officiellement reconnu par les Premières Nations et le Canada. Ainsi, la création et le mandat d'un tel organisme nécessiteraient une résolution par les Premières Nations et une loi fédérale. Le comité envisage une loi fédérale qui assure la suffisance et la prévisibilité du financement et un processus d'examen périodique (par exemple, tous les 5 à 10 ans) pour s'assurer que le mandat et les niveaux de financement de l'institution soient rajustés au fil du temps.

  • Recommandation 19 : Le comité recommande d'établir et de financer un organisme responsable de la politique financière des Premières Nations. Cet organisme serait responsable de la trésorerie, de la coordination, de la recherche, de l'évaluation, de la production de rapports et de l'amélioration continue à l'appui des relations financières entre la Couronne et les Premières Nations. Le comité recommande en outre que le mandat et les niveaux de financement permanents de cet organisme soient révisés tous les 5 ans par les Premières Nations et le Canada dans le cadre d'un processus conjoint.
  • Recommandation 20 : Le comité recommande que l'on présente aux Premières Nations et au Parlement du Canada un rapport annuel sur les mesures prises et les progrès réalisés par les Premières Nations et le gouvernement du Canada afin de combler les écarts socioéconomiques. Le comité recommande que le rapport au Parlement du Canada devienne l'obligation du premier ministre du Canada en vertu de la loi. De plus, le comité recommande que le dirigeant du nouvel organisme responsable de la politique financière des Premières Nations soit chargé, en vertu d'une résolution des Premières Nations, de présenter des rapports annuels aux dirigeants et aux citoyens des Premières Nations.

9.2 Le vérificateur général des Premières Nations assurera la surveillance et dirigera le changement

Des mécanismes de surveillance impartiaux, comme un vérificateur général, favorisent la confiance à l'égard des institutions et dépolitisent les relations. Le comité croit qu'il est nécessaire qu'une fonction de vérificateur général des Premières Nations soit instituée pour fournir une assurance indépendante, objective et professionnelle quant à l'efficience et à l'efficacité des processus et des structures institutionnels qui soutiennent les relations entre la Couronne et les Premières Nations. En ce qui concerne l'organisme national de statistique des Premières Nations, l'organisme responsable de la politique financière des Premières Nations et les processus à l'appui des transferts législatifs aux Premières Nations, le comité estime que des examens et des vérifications du rendement, des vérifications de la conformité aux lois et aux politiques et des vérifications de l'efficacité et de l'efficience des pratiques administratives et de gouvernance sont nécessaires.

Presque tous les pays et la plupart des administrations infranationales et locales des pays développés ont une fonction de vérificateur général. Les ressources publiques appartiennent aux citoyens d'un pays, et la vérification de la conformité et du rendement du secteur public appuie et renforce la responsabilité fondamentale d'un gouvernement de rendre compte à ses citoyens de l'utilisation des fonds publics et des résultats obtenus. Pour les pays du monde entier, le fait d'avoir une fonction de vérificateur général fait tout simplement partie de l'identité nationale. Le comité estime que les gouvernements des Premières Nations et leurs citoyens méritent également d'avoir accès à l'assurance objective et indépendante conférée par une fonction de vérificateur général.

Conformément aux résolutions déjà adoptées par les chefs réunis en assemblée et par un collectif régional des Premières Nations, le comité envisage un régime facultatif permettant aux Premières Nations de choisir de travailler avec un vérificateur général des Premières Nations. En ce qui concerne le régime des transferts législatifs décrit à la section 5.3, le comité estime nécessaire que les gouvernements des Premières Nations participent à une telle relation avec un vérificateur général.

Reconnaissant qu'il ne soit ni financièrement viable ni faisable sur le plan opérationnel (c'est-à-dire, l'accès limité aux professionnels autochtones) d'établir à court terme des vérificateurs généraux nationaux ou régionaux, le comité croit que la priorité du financement fédéral devrait être la création d'un organisme national de vérificateur général des Premières Nations. Sous réserve de la participation des Premières Nations, le comité note qu'il est possible d'inclure dans les résolutions des Premières Nations et la loi fédérale des dispositions qui créent et reconnaissent le vérificateur général des Premières Nations et prévoient que celui-ci sera soumis à un examen au terme de 5 ou 10 ans (c'est-à-dire, pour examiner le mandat et les niveaux de financement et examiner les avantages d'un financement des fonctions d'un vérificateur général régional).

Pour en arriver à son avis, le comité s'est également demandé s'il serait possible qu'un vérificateur général des Premières Nations effectue la vérification des états financiers des organismes des Premières Nations et des gouvernements des Premières Nations. Le comité a conclu que cela nuirait aux vérifications de gestion. De plus, il existe des cabinets d'experts-comptables compétents qui effectuent déjà des vérifications d'états financiers pour les gouvernements des Premières Nations et les institutions existantes des Premières Nations.

  • Recommandation 21 : Le comité recommande qu'un vérificateur général des Premières Nations soit nommé et chargé de fournir une assurance et des conseils indépendants, objectifs et professionnels aux institutions des Premières Nations et aux gouvernements des Premières Nations qui choisissent de participer, notamment à l'égard des processus qui appuient la mise en œuvre des transferts législatifs.

10. Maintien du Comité consultatif mixte sur les relations financières

Le comité recommande qu'il demeure dans sa forme actuelle dans l'avenir immédiat, en attendant la création d'un organisme des Premières Nations chargé de superviser et de coordonner la mise en œuvre d'une nouvelle relation financière (c'est-à-dire, l'organisme responsable de la politique financière des Premières Nations). Une fois que le chef national et le ministre auront examiné ces conseils et déterminé les prochaines étapes, le comité offre de jouer un rôle proactif en s'engageant avec les dirigeants et les experts des Premières Nations ainsi qu'avec le gouvernement du Canada pour examiner, peaufiner et adapter sa vision. Le comité note qu'il est nécessaire de doter le Secrétariat des relations financières d'un financement adéquat pour appuyer ces activités et contribuer à la mise en œuvre des recommandations, le cas échéant. La transition vers des institutions permanentes dotées de responsabilités élargies sera l'un des sujets qui feront l'objet d'un engagement et de conseils supplémentaires, lorsque le chef national et le ministre l'appuieront.

11. Observations finales

Le comité reconnaît que les objectifs énoncés dans le présent document sont ambitieux et que les étapes à franchir pour y parvenir seront complexes à clarifier et à mettre en œuvre, mais il tient à souligner l'importance d'adopter une approche globale pour réaliser la transformation décrite. Chacune des recommandations du présent document se rapporte à un élément essentiel d'un plan plus vaste. Ce plan vise à réaliser la vision énoncée en suivant un cheminement guidé par les valeurs et les principes décrits, en mettant en œuvre les étapes recommandées pour y parvenir.

Le comité est d'avis que le plan établi peut fonctionner, que grâce à une collaboration étroite avec les Premières Nations, il est possible d'établir les détails des stratégies établies, et qu'avec la collaboration de l'État, les objectifs peuvent être atteints. En agissant avec amour, honnêteté, révérence, respect et honneur, chacun peut trouver sa place et faire entendre sa voix dans ce projet ambitieux. Nous devons avoir le courage d'aller de l'avant, et l'humilité de reconnaître que le plan devra être rajusté à mesure que nous en saurons davantage, car nous ne connaissons pas l'avenir. Ces décisions seront guidées par la compréhension de la vérité inspirée de la sagesse de nos ancêtres, au service de ceux à venir.

Il a fallu des générations pour en arriver là où nous en sommes aujourd'hui et il faudra du temps pour que le changement à l'échelle envisagée ici porte ses fruits. Les structures coloniales entravent les approches des Premières Nations depuis si longtemps que la reconstruction est beaucoup plus compliquée qu'elle ne l'aurait été autrement. Certains changements peuvent commencer immédiatement, d'autres nécessiteront une planification minutieuse et d'autres encore doivent avoir lieu selon des séquences qui tiennent compte de la réalité des relations existantes entre les Premières Nations et le Canada.

Une représentation visuelle de la voie de l'avenir, conformément à la vision du comité, est présentée ci-dessous.

Description d'Ouvrir la voie vers une nouvelle relation financière

« Ouvrir la voie vers une nouvelle relation financière » démontre les 3 étapes pour établir une nouvelle relation financière, ainsi que les échéanciers qui s'y rattachent et les résultats escomptés.

La première étape (de 2019 à 2023) consiste à établir la confiance par l'honneur, le respect et la réparation.

Les mesures visant à appuyer la première étape sont les suivantes :

  • vaste processus de mobilisation auprès des Premières Nations;
  • déconstruction des politiques et des pratiques nuisibles;
  • progrès réalisés en matière de partage des recettes avec les provinces et les territoires;
  • financement accru pour les gouvernements des Premières Nations;
  • règlement des revendications particulières, droits fonciers issus de traités et ajouts aux réserves;
  • investissements dans les institutions des Premières Nations;
  • souplesse accrue dans les ententes de financement.

La deuxième étape (de 2020 à 2026) vise la construction des éléments fondamentaux.

Les mesures visant à appuyer cette étape sont les suivantes :

  • reconnaissance des droits, du titre et des compétences;
  • respect de l'esprit et de l'intention des traités;
  • croissance économique;
  • financement suffisant, prévisible et à long terme;
  • responsabilité mutuelle au moyen de :
    • mesure fondée sur des données probantes;
    • examen et amélioration continus;
    • institutions et lois pour mettre en œuvre la relation financière;
    • soutien de la capacité des organismes pour les Premières Nations, par les Premières Nations.

La troisième étape (date cible : 2026) consiste en la nouvelle option pour les transferts législatifs.

Le résultat attendu de cette voie est l'atteinte du bien-être grâce à l'autodétermination (de 2019 à 2027 et années subséquentes).

Cette réalisation sera caractérisée par :

  • des nations autonomes, au service de tous leurs citoyens;
  • des services publics plus nombreux et de meilleure qualité;
  • des maisons plus saines et de meilleures conditions de vie;
  • plus d'emplois et de meilleurs emplois ;
  • les Premières Nations maintiennent le mode de vie qui leur est destiné;
  • possibilités de vie accrues pour les personnes;
  • soutien social et guérison;
  • fierté à l'égard de nos cultures, de nos langues, de nos traditions et de nos histoires, et maîtrise de celles-ci;
  • possibilités accrues de liens spirituels avec la terre;
  • des collectivités plus sûres et une réduction de la criminalité.

Annexe A – Valeurs communes aux Premières Nations

Les Premières Nations ont des enseignements et des principes variés qui fournissent une orientation morale et un fondement culturel. Ces enseignements prônent généralement le respect moral de tous les êtres vivants. Bien que ces enseignements et croyances varient d'une nation à l'autre, il y en a 7 auxquels croient de nombreuses nations.

La vérité : Ne parler que dans la mesure de ce que nous avons vécu ou expérimenté, c'est connaître la vérité. Appliquez la foi et la confiance dans vos enseignements. Faites preuve d'honneur et de sincérité dans tout ce que vous dites et faites. Sachez où est votre place dans cette vie et appliquez cette compréhension dans votre façon de cheminer. Soyez fidèle à vous-même et à tous les autres êtres.

L'humilité : L'humilité est de savoir que vous êtes une partie sacrée de la création. Vivez la vie de manière généreuse et humble. Respectez votre place et portez votre fierté avec votre peuple et louez les réalisations de tous. Ne devenez pas arrogant ou vaniteux. Trouvez l'équilibre à l'intérieur de vous-même et de tout ce qui vit.

Le respect : Honorer toute la création, c'est avoir du respect. Vivez honorablement dans vos enseignements et dans vos actions envers toute chose. Ne gaspillez pas et soyez conscient de l'équilibre de tous les êtres vivants. Partagez et donnez ce dont vous n'avez pas besoin. Traitez les autres comme vous aimeriez être traité. Ne soyez pas blessant envers vous-même ou les autres.

L'amour : Connaître l'amour, c'est connaître la paix. Voyez votre moi intérieur du point de vue de tous les enseignements. C'est de connaître l'amour et de s'aimer vraiment. Alors vous serez en paix avec vous-même, avec l'équilibre de la vie, avec toutes les choses et aussi avec le créateur.

L'honnêteté : Marcher dans la vie avec intégrité, c'est connaître l'honnêteté. Soyez honnête avec vous-même. Reconnaissez et acceptez qui vous êtes. Acceptez et utilisez les cadeaux qui vous ont été donnés. Ne cherchez pas à vous tromper vous-même ou à tromper les autres.

Le courage : Affronter la vie avec courage, c'est connaître la bravoure. Trouvez votre force intérieure pour affronter les difficultés de la vie et avoir le courage d'être vous-même. Défendez ce en quoi vous croyez et ce qui est bon pour votre communauté, votre famille et vous-même. Faites des choix positifs et ayez de la conviction dans vos décisions. Affrontez vos peurs pour vous permettre de vivre votre vie.

La sagesse : Chérir la connaissance signifie connaître la sagesse. Utilisez vos dons inhérents avec sagesse et vivez votre vie en les respectant. Reconnaissez vos différences et celles des autres d'une manière aimable et respectueuse. Observez continuellement la vie de tout ce qui vous entoure. Écoutez avec la clarté d'un esprit sain. Respectez vos propres limites et celles de votre entourage. Permettez-vous d'apprendre et de vivre selon votre sagesse.

Annexe B – Principes de PCAP®

Tels qu'ils sont énoncés par le Centre de gouvernance de l'information des Premières Nations, les principes de PCAP® des Premières Nations sont un ensemble de normes qui établissent comment les données des Premières Nations doivent être recueillies, protégées, utilisées ou communiquées. Il s'agit de la norme de facto sur la façon de mener des recherches avec les Premières Nations. Défendant la propriété, le contrôle, l'accès et la possession, les principes de PCAP® affirment que les Premières Nations ont le contrôle sur les processus de collecte de données dans leurs communautés et qu'elles possèdent et contrôlent la façon dont cette information peut être utilisée. Les principes de PCAP® comportent quatre composantes : propriété, contrôle, accès et possession.

Propriété – Il s'agit de la relation que les Premières Nations entretiennent avec leur savoir culturel et leurs données et renseignements les concernant. Selon ce principe, une communauté ou un groupe est collectivement propriétaire de l'information, à l'instar d'un individu qui est naturellement propriétaire de ses renseignements personnels.

Contrôle – Selon ce principe, les Premières Nations, leurs communautés et les organismes qui les représentent ont le droit d'exiger le contrôle d'intégralité de la recherche et des processus de gestion de l'information les concernant. Le contrôle de la recherche peut comprendre toutes les étapes d'un projet, c'est-à-dire du début à la fin. Le principe concerne aussi le contrôle de divers processus, dont l'attribution des ressources et l'examen, la planification, la gestion de l'information.

Accès – Quel que soit l'endroit où se trouvent des renseignements et données concernant les Premières Nations et leurs communautés, les Premières Nations doivent y avoir accès. Ce principe confirme également le droit des communautés et des organisations des Premières Nations de prendre des décisions concernant l'accès à leur information collective et la gestion de cet accès. Concrètement, ce droit peut être exercé au moyen de protocoles officiels normalisés.

Possession – Alors que la propriété définit la relation qui existe entre un peuple et l'information le concernant, la possession ou la gestion est, quant à elle, un principe plus concret. Il s'agit du contrôle matériel des données. La possession est un mécanisme permettant de faire valoir et de protéger la propriété.

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